Les déchets radioactifs sont très divers de par leur radioactivité, leur durée de vie, leur volume ou encore leur nature (ferrailles, gravats, huiles…). Chaque type de déchets nécessite un traitement et une solution de gestion à long terme adaptés afin de maîtriser les risques présentés, notamment le risque radiologique. En France, chaque catégorie de déchets est gérée dans une filière particulière qui comprend une série d'opérations comme le tri, le traitement, le conditionnement, l'entreposage et le stockage de déchets ultimes.
Pour environ 90% du volume des déchets ultimes produits, il existe actuellement des solutions pérennes de gestion qui sont déjà mises en oeuvre. Les autres déchets sont conditionnés et entreposés dans des installations sûres dans l'attente d'une solution de gestion à long terme.
Entreposage et stockage
Il faut distinguer l'entreposage, qui est provisoire, du stockage, qui est une solution définitive de gestion des déchets radioactifs. En effet, l'entreposage est conçu pour abriter les déchets pour une durée déterminée ; les déchets doivent, à l'issue de cette période, être récupérés. L'entreposage ne saurait être une solution d'élimination des déchets sur le long terme. En revanche, le stockage, même s'il comporte une part de réversibilité, est par conception destiné à gérer les déchets sans limite de durée.
Les filières de gestion à développer
Aujourd'hui en France, 10 % du volume des déchets radioactifs contenant plus de 99% de la radioactivité totale des déchets, ne disposent pas d'une solution définitive de gestion. Dans l'attente d'une solution de gestion à long terme, ces déchets sont conditionnés et entreposés dans des installations sûres.
Les déchets de faible activité à vie longue
Du fait de leur longue durée de vie, ces déchets ne peuvent être éliminés dans un centre de stockage en surface car il n'est pas possible de bénéficier de leur décroissance radioactive dans un délai compatible avec la permanence d'une surveillance institutionnelle permettant d'éviter l'intrusion humaine dans le stockage. Cependant, leur faible dangerosité permet d'envisager de les éliminer dans un stockage à faible profondeur, à au moins une quinzaine de mètres.
En 2008, le processus de recherche d’un site de stockage pouvant accueillir les déchets de type FAVL mené par l’Andra n’a pu aboutir. Aussi, afin d’en tirer le retour d’expérience, des groupes de travail se sont constitués, notamment au sein du HCTISN et de la Convention d’Aarhus. Ils ont rendu leurs recommandations afin de mieux préparer la démarche de recherche d’un futur site de stockage.
Le PNGMDR 2013-2015 a demandé à l’Andra de poursuivre ses études et aux propriétaires de déchets FAVL de progresser dans la caractérisation de leurs déchets. Des rapports sur ces travaux ont été remis par l’Andra et les propriétaires de déchets FAVL en 2015 et l’ASN a rendu son avis le 29 mars 2016.
Au regard des incertitudes demeurant sur la capacité du site de stockage étudié à accueillir l’ensemble des déchets prévus dans l’inventaire de référence, les investigations géologiques sur le site de stockage et la définition d’un schéma industriel global doivent se poursuivre dans le cadre du PNGMDR 2016-2018.
Un schéma industriel global de gestion de l’ensemble des déchets radioactifs FA-VL est attendu avant fin 2019.
Les déchets de moyenne activité et les déchets de haute activité à vie longue
Les déchets de moyenne et de haute activité à vie longue sont essentiellement issus du procédé de traitement des combustibles usés déchargés des centrales nucléaires. Le procédé de traitement sépare : le plutonium, qui est recyclé dans les combustibles MOX ("mixed oxyde fuel") ; l'uranium de recyclage (URt), qui peut être en partie recyclé dans des réacteurs à eau sous pression ; les produits de fission et d'activation, notamment les actinides mineurs, qui sont vitrifiés dans des conteneurs destinés au stockage en coche géologique profonde, après une période d'entreposage nécessaire à leur refroidissement.
Ces déchets vitrifiés sont dits de haute activité. Le traitement des combustibles irradiés produit également des déchets de moyenne activité à vie longue, notamment les colis de coques et embouts ou les bitumes issus du traitement d'effluents.
Afin de disposer d'une filière de gestion définitive pour ces déchets, la loi de programme du 28 juin 2006 sur la gestion durable des matières et des déchets radioactifs a prévu la poursuite des recherches selon les trois axes initiés en 1991 : la séparation et la transmutation des éléments radioactifs à vie longue ; le stockage réversible en couche géologique profonde ; l'entreposage.
Concernant l'axe consacré au stockage, l'ASN a remis le 11 janvier 2018 son avis sur le Dossier d'options de sûreté (DOS) de Cigéo remis par l'ANDRA
Le cas particulier de certains déchets de faible et moyenne activité à vie courte
Parmi les déchets de faible ou moyenne activité à vie courte, certains ont des caractéristiques telles qu'ils ne peuvent être actuellement acceptés au Centre de stockage de l'Aube (CSA) exploité par l'Andra à Soulaines, sans une autorisation complémentaire de la part de l'ASN. C'est notamment le cas de certaines sources scellées usagées qui présentent des activités concentrées et qui même après 300 ans pourraient continuer à présenter un risque radiologique. Ainsi, seules des sources d'activité limitées peuvent être stockées dans le centre de l'Aube. C’est également le cas de déchets contenant des quantités importantes de tritium.
Des études sur ces déchets sont menées dans le cadre du PNGMDR. L’ASN a rendu en 2016 des avis sur les études menées. Ces études se poursuivent dans le cadre du PNGMDR 2016-2018.
Les déchets de moyenne et de haute activité à vie longue
Il n'existe pas actuellement de filière d'élimination de ces déchets, qui sont pour le moment entreposés dans des installations nucléaires conçues à cet effet. Des recherches pour leur élimination sont menées conformément à l'article 3 de la loi du 28 juin 2006, qui dispose que la gestion des déchets radioactifs de haute activité ou de moyenne activité à vie longue fait l’objet de trois axes complémentaires de recherches et études, dont l’état d’avancement est précisé plus bas :
- la séparation et la transmutation des radionucléides à vie longue.
- le stockage réversible en couche géologique profonde, avec l’objectif de choisir un site et de concevoir et mettre en exploitation un centre de stockage pour la gestion à long terme des déchets radioactifs HA MAVL ;
- l’entreposage, avec pour objectif de créer de nouvelles installations d’entreposage ou de modifier des installations existantes pour répondre aux besoins recensés par le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR).
État d'avancement des recherches
Les résultats de la recherche ont montré que la séparation transmutation est une étape à long terme, et qu'il ne sera pas possible de mettre en oeuvre de telles opérations avant 2040-2050. Il est prévu par la loi du 28 juin 2006 qu'un prototype d'installation soit mis en exploitation en 2020. Néanmoins, cette technique ne permettra pas de transmuter tous les déchets. Une autre solution de référence s'avère donc nécessaire.
La loi du 28 juin 2006 codifiée, a confié à l’ANDRA (art L. 542-12 et L. 542-10-1 du code de l’environnement) la mission de concevoir un projet de centre de stockage réversible de déchets radioactifs en couche géologique profonde : c’est le projet Cigéo. Les recherches conduites sur ce sujet par l’ANDRA, notamment sur le site de Bure, ont permis de rassembler des éléments majeurs relatifs à la démonstration de faisabilité d’un stockage en couche géologique profonde. À la suite du débat public sur le projet Cigéo dont les conclusions ont été rendues au début de l’année 2014, le conseil d’administration de l’ANDRA a pris la décision de soumettre à l’ASN un dossier d’options de sûreté pour préparer l’instruction de la demande d’autorisation de création de Cigéo. Ce dossier a été remis début avril 2016.
Enfin, les recherches sur l'entreposage mettent en évidence que ces installations sont indispensables pour une bonne gestion des déchets, notamment leur refroidissement avant stockage en formations géologiques profondes. Elles ne peuvent toutefois pas constituer une solution pérenne, compte tenu du fait qu'elles nécessitent un entretien et une surveillance constante de la part de leurs exploitants. Or il n'est pas possible de garantir la pérennité des institutions sur des périodes aussi longues.
Les filières de gestion existantes
Pour environ 90% du volume des déchets radioactifs ultimes produits, il existe actuellement des solutions pérennes de gestion des déchets radioactifs déjà mises en oeuvre.
Les déchets de très courte durée de vie
Lorsque leur période radioactive est inférieure à 100 jours, et lorsqu’ils sont produits par des installations ne relevant pas du statut des installations nucléaires de base (INB) certains déchets radioactifs peuvent recueillis etêtre entreposés pendant une durée (de quelques jours à quelques semaines) permettant à la radioactivité de pratiquement disparaître. Ces déchets sont ensuite éliminés comme tels dans les circuits conventionnels.
C’est notamment le cas pour certains déchets hospitaliers, issus des activités de diagnostic ou de soins.
Les déchets de très faible activité (TFA)
Ces déchets, principalement issus du démantèlement des installations nucléaires et dont la radioactivité est de l'ordre de quelques becquerels par gramme, sont stockés dans un centre de stockage de surface situé dans l'Aube à Morvilliers.
L'installation de stockage des déchets TFA du CIRES (Centre industriel de regroupement, d’entreposage et de stockage), exploité par l'ANDRA, possède une capacité de stockage de 650 000 m3 de déchets.
Une très faible quantité de déchets TFA est recyclée dans l'industrie nucléaire. Une partie du plomb est ainsi refondue pour fabriquer des protections contre les rayonnements qui sont réutilisées dans les installations.
Le nombre de chantiers de démantèlement des installations nucléaires, même s'il est d'ores et déjà relativement important en France, ne va cesser de s'accroître dans les prochaines années. En effet, la majorité des installations nucléaires construites entre 1960 et les années 1980, devra être démantelée à partir des années 2020.
Les déchets de faible et moyenne activité à vie courte (FMA-VC)
La solution technique généralement adoptée pour ce type de déchets, issus de l'exploitation et de la maintenance des réacteurs nucléaires, des usines du cycle du combustible, des centres de recherche, des laboratoires universitaires et des hôpitaux, est l'évacuation, directe ou après traitement par incinération ou fusion, vers un centre de stockage en surface, où les colis de déchets sont déposés dans des ouvrages bétonnés.
Cette filière d'élimination est opérationnelle depuis 1969, date à laquelle la France a renoncé à participer aux campagnes d'immersion de déchets faiblement radioactifs organisées par l'OCDE. À cette date, 14 300 m3 de déchets radioactifs d'origine française avaient été immergés dans l'Atlantique.
Les déchets de faible et moyenne activité à vie courte ont tout d'abord été stockés au Centre de stockage de la Manche (CSM). Exploité pendant une période de 25 ans, le site a accueilli un volume d'environ 527 000 m3 de déchets. Aujourd'hui, le Centre de la Manche est protégé par une couverture étanche et ne reçoit plus de nouveaux déchets. Il est entré en phase de surveillance en 2003.
Depuis 1992, c'est le Centre de stockage de l'Aube (CSA), exploité par l'ANDRA à Soulaines dans l'Aube, qui accueille les déchets de faible et moyenne activité à vie courte. Chaque année, le centre reçoit entre 12 et 13 000 m3 de déchets à stoker. À la fin de l'année 2016, le volume des déchets stockés au Centre de stockage de l'Aube s'élevait à environ 316 000 m3, ce qui représente environ 31,6 % de la capacité autorisée.
Les évolutions à l'horizon 2020
Le nombre de chantiers de démantèlement des installations nucléaires, même s'il est d'ores et déjà relativement important en France, ne va cesser de s'accroître dans les prochaines années. En effet, la majorité des installations nucléaires construites entre 1960 et les années 1980, devra être démantelée à partir des années 2020. La majorité des déchets radioactifs issus des opérations de démantèlement des installations de production d'électricité et du cycle du combustible sont de très faible activité (TFA).
Ainsi, alors que 482 000 m3 de déchets TFA ont été produits à fin 2016, les prévisions de production parviennent à un stock de 650 000 m3 en 2020, de 1 100 000 m3 en 2030 et de 2 200 000 m3 à terminaison des installations existantes.
L’installation de stockage des déchets de très faible activité du Cires (centre industriel de regroupement, d’entreposage et de stockage) exploitée par l’Andra à Morvilliers (Aube) dispose actuellement d’une capacité de stockage d’un volume de 650 000 m3. De nouvelles capacités de stockage seront nécessaires à moyen terme[1] pour permettre la gestion en toute sûreté des déchets TFA qui seront produits d’ici à la fin du démantèlement des installations existantes. En particulier, l’Andra envisage de demander l’autorisation de porter à environ 900 000 m3 la capacité de stockage du Cires pour une même emprise en sol.
Des pistes complémentaires de gestion des déchets TFA sont par ailleurs étudiées afin de mieux exploiter les marges d’optimisation de la gestion de ces déchets.
Sur la base notamment de l’avis qu’a rendu l’ASN, le 18 février 2016, sur les études concernant la gestion des déchets de très faible activité (TFA) et de faible et moyenne activité à vie courte (FMA-VC) remises en application du PNGMDR 2013-2015, le PNGMDR 2016-2018 demande :
- que des progrès soient réalisés dans chacune des pistes d’optimisation de la gestion des déchets TFA ;
- que certaines des pistes étudiées (valorisation des matériaux concassés en stockage, extension des capacités du stockage) soient, sauf élément rédhibitoire, mises en œuvre ;
- que la réflexion soit approfondie notamment pour les pistes de valorisation des matériaux métalliques, de densification du stockage et de création d’autres installations de stockage (deuxième centre de stockage sur la base du retour d’expérience du Cires, centres locaux adaptés à certains types de TFA).
Un point d’étape général sur la filière est attendu pour fin 2020 par la mise à jour du schéma directeur de gestion des déchets TFA.
[1] Il est nécessaire de distinguer « déchets produits » et « déchets stockés ». Les déchets peuvent être produits mais ne pas avoir encore été placés dans un centre de stockage dédié.