Fort de Vaujours (77-93) : l’ASN prend acte des engagements de Placoplatre et formule des recommandations pour prévenir les risques radiologiques dans le cadre de l’exploitation de la future carrière.

Publié le 10/11/2021 à 13:20

Information régionale

L’ASN a rendu aux préfets de Seine-et-Marne et de Seine-Saint-Denis un premier avis, le 11 mai 2021, sur le dossier de demande d’autorisation d’exploiter de la société Placoplatre pour la carrière de Vaujours-Guisy. Le 5 août 2021, elle a rendu un second avis, cette fois-ci sur le dossier de demande de modification de l’arrêté interpréfectoral instaurant des servitudes d’utilité publique (SUP) sur l’ancien site du CEA situé sur le Fort de Vaujours. Elle formule à chaque fois des recommandations visant à prévenir les risques radiologiques.

La société Placoplatre a déposé en septembre 2019, puis complété en mai 2020, un dossier de demande d’autorisation d’exploiter une carrière sur l’ancien site du CEA situé dans le Fort de Vaujours.

Le Fort de Vaujours, situé sur le territoire des communes de Vaujours (93) et de Courtry (77), fut exploité de 1955 à 1997 par le CEA pour l’expérimentation d’armements pyrotechniques et nucléaires, en utilisant notamment de l’uranium naturel et appauvri. à l’issue de cette période d’exploitation, le CEA a conduit, de 1996 à 1998, puis de 2001 à 2002, des opérations de démantèlement et d’assainissement des bâtiments et des sols susceptibles d’avoir fait l’objet d’une contamination. En 2010, la société Placoplatre a acquis une partie du site pour y exploiter une carrière de gypse destinée à approvisionner son usine de transformation en plâtre, également située à Vaujours. Préalablement à ce projet, Placoplatre a commencé la démolition des anciens bâtiments du site.

Afin de se prononcer sur les enjeux radiologiques associés à ce projet d’exploitation d’une carrière, l’ASN a saisi l’IRSN, qui a rendu deux avis sur le sujet, le 5 novembre 2020 et le 29 avril 2021.

Sur la base de ces avis et de l’examen du dossier déposé, l’ASN considère que les mesures envisagées pour prévenir les impacts radiologiques sur les travailleurs, les riverains, l’environnement et sur les matériaux extraits sont satisfaisantes. Elle formule toutefois plusieurs recommandations à mettre en œuvre avant et pendant la réalisation du projet.

En outre, Placoplatre a demandé une modification de l’arrêté interpréfectoral N° 05 DAI 2IC 173 du 22 septembre 2005 instaurant des servitudes d’utilité publique (SUP). L’ASN s’est prononcée notamment sur l’article relatif à la radioactivité résiduelle, autre que naturelle. Les modifications visent à apporter des corrections et à autoriser, d’une part, l’évacuation des terres contaminées vers les filières appropriées et, d’autre part, la valorisation des terres et matériaux naturels excavés non contaminés issus de l’emprise des parcelles visées par les SUP. Ces terres pourront être donc utilisées pour le remblayage de la carrière de gypse limitrophe en cours d’exploitation (fosse d’Aiguisy) et de la future carrière dont le périmètre est plus large que celui des SUP.

Les recommandations de l’ASN à mettre en œuvre avant et pendant la réalisation du projet, et les principaux éléments de l’avis de l’ASN sur les modifications de l’arrêté interpréfectoral N°05 DAI 2IC 173 du 22 septembre 2005 sont détaillés ci-dessous.

Prévention de l’exposition radiologique des travailleurs et des riverains

Placoplatre a transmis une évaluation des expositions radiologiques des travailleurs et des riverains. Elle comprend un scénario d’exposition par inhalation de poussières pour les travailleurs, et un scénario d’exposition lors de l’utilisation des eaux de la nappe de l’Eocène supérieur pour la boisson pour les riverains. Dans les deux cas, l’exposition radiologique, calculée de façon pénalisante, est faible. Il est toutefois demandé à Placoplatre de mettre à jour son évaluation, notamment les termes sources considérés, au fur et à mesure des résultats des investigations radiologiques complémentaires menées sur les terres ou matériaux issus des zones polluées ou susceptibles de l’être.

Impact radiologique sur l’environnement et mesures de surveillance associées

Les principaux enjeux identifiés concernent la surveillance atmosphérique, la protection des nappes et la gestion des eaux dans le cadre de l’exploitation de la carrière.

Le dispositif de suivi atmosphérique déjà mis en place sera maintenu durant toute la période d’exploitation et de remise en état de la carrière. Il comprend des balises de prélèvement et de mesures en temps réel et des dispositifs de prélèvement sur filtres fixes mesurés en différé, disposés en bordure d’exploitation. Ces dispositifs de mesures en différé sont également disposés dans les localités environnantes du site, pour assurer une surveillance au plus proche de la population. Ce suivi atmosphérique apparait satisfaisant.

S’agissant de la nappe de l’Eocène supérieur, l’exploitant s’est engagé à utiliser en remblayage en fond de fouille les marnes et argiles, peu perméables, issues de la découverture du gypse. Par ailleurs, les mesures radiologiques actuellement menées sur les eaux collectées en fond de fouille seront poursuivies pendant la phase d’exploitation de la carrière, afin de s’assurer de l’absence d’enjeu radiologique. En outre, la nappe de l’Eocène sera surveillée jusqu’à la cessation d’activité de la carrière, grâce à un réseau de piézomètres.

Pour accéder aux masses de gypse, les calcaires de Brie seront excavés. Or les eaux de ressuyage de ces calcaires présentent un potentiel enjeu radiologique. Aussi, l’exploitant ne procédera à leur excavation qu’après une campagne d’investigation de ces sols.

Enfin, l’ASN préconise aux préfets de demander à Placoplatre des précisions sur les modalités de gestion des éventuels suintements de la nappe des calcaires de Brie, susceptibles de se produire après l’aménagement des talus de la fosse. Ces derniers pourraient générer un transfert vers la fosse de polluants chimiques et radiologiques.

Enjeux radiologiques associés aux matériaux, ainsi que leur caractérisation et leur gestion

L’IRSN, dans son avis du 5 novembre 2020, a listé un certain nombre de recommandations pour prévenir tout risque de dissémination de matériaux contaminés. Elles visent notamment à renforcer la fiabilité de la caractérisation opérée, étape décisive dans la stratégie de gestion des matériaux. Aussi, Placoplatre s’est engagé à prendre en compte l’ensemble des matériaux à enjeu radiologique, notamment les gravats issus d’ouvrages situés dans des zones contaminées ou susceptibles de l’être et la première masse de gypse en direction des puits P2 et P4.

Afin d’augmenter la robustesse du maillage et du pas d’échantillonnage dans les zones concernées par des prélèvements par sondage, Placoplatre se fera accompagner par un bureau d’études spécialisé en géostatistique pour définir son plan d’échantillonnage.

Enfin, l’ASN a demandé la démonstration de la fiabilité du système de contrôle radiologique du gypse concassé en entrée d’usine sur le convoyeur à bandes, avant le commencement de l’exploitation du gypse. Cette démonstration comprendra les études théoriques, les tests opérationnels et la preuve de l’adéquation des limites de détection aux concentrations potentiellement observables.

Modification des servitudes d’utilité publique pour évacuation des terres contaminées et valorisation des matériaux

L’arrêté interpréfectoral N° 05 DAI 2IC 173 du 22 septembre 2005 instaurant des servitudes d’utilité publique (SUP) impose le stockage des terres excavées sur les parcelles incluses dans le périmètre des SUP, qu’elles présentent une contamination radiologique ou non. De ce fait, l’arrêté actuel ne permet pas la valorisation des terres excavées non contaminées soumises aux SUP dans la totalité de l’emprise de la future carrière. La modification proposée ouvre la possibilité de valoriser, à proximité (dans le périmètre ICPE de la carrière), les terres excavées ou matériaux de démolition présentant une concentration en uranium-238 inférieure à la valeur limite d’exemption de 1 Bq/g. Il s’agit de la valeur limite d’exemption du tableau 1 « radioactivité naturelle dans les matières solides » de l’annexe 13-8 au code de la santé publique pour l’238U et sa filiation radioactive. Cette valorisation sera soumise à une Évaluation Quantitative de l’Exposition Radiologique (EQER) afin d’encadrer, le cas échéant, les mesures de radioprotection pour les travailleurs.

A l’inverse, les terres et matériaux dont la concentration en uranium-238 excède la valeur d’exemption de 1 Bq/g seront évacués hors du site, dans les filières adaptées.


A la suite de l’avis du 11 mai 2021 que l’ASN a rendu sur le dossier de demande d’autorisation d’exploiter de la société Placoplatre pour la carrière de Vaujours-Guisy, l’exploitant va compléter son dossier, en vue de son instruction par la Direction régionale et interdépartementale de l’environnement, de l’aménagement et des transports (DRIEAT).

Pour en savoir plus :

 

 

Date de la dernière mise à jour : 10/11/2021