Livre blanc du Tritium & bilan des rejets de tritium pour les INB

47 Le tritium dans l’environnement l’augmentation cumulative, à mesure qu’on progresse dans la chaîne alimentaire (chaîne trophique), des concentrations d’une substance persistante. Au sens strict du terme, la bioaccumulation résulte d’un phénomène d’accumulation progressive d’un contaminant ou d’une substance toxique dans un organisme, à partir de diverses sources, y compris l’atmosphère, l’eau et les aliments, jusqu’à l’obtention d’un état d’équilibre entre accumulation et élimination de la substance. Ainsi, en milieu aquatique, on parle de bioaccumulation lorsque, suite à une exposition durable à un contaminant à faible concentration dans l’eau, on observe une concentration plus importante dans l’organisme. Dans d’autres cas, lorsque la voie d’exposition est l’alimentation, il y a bioaccumulation lorsque la concentration du contaminant dans l’organisme exposé durablement est supérieure à celle mesurée dans son alimentation. Si le phénomène se reproduit à chaque étape d’une chaine trophique, on parle alors de bioamplification telle que définie ci-dessus. A titre d’exemple, des phénomènes de bioaccumulation et de bioamplification peuvent être observés pour les PolyChloroBiphényle (PCB) dans l’eau, qui tendent à se fixer sur les graisses. Il est habituel de décrire la bioaccumulation à l’aide d’un « facteur de bioaccumulation » (ou bioconcentration) défini par le rapport des concentrations du contaminant dans l’organisme vivant (ou un de ses organes ou tissus) et dans le milieu ambiant (l’eau, le plus souvent). Parfois, le facteur de bioconcentration est défini en considérant la concentration du contaminant dans les aliments consommés par l’organisme, plutôt que celle du milieu ambiant. Il convient d’être prudent dans l’interprétation des facteurs de bioconcentration obtenus à partir de mesures ponctuelles dans l’environnement ; en effet, le constat de valeurs supérieures à 1 ne signifie pas systématiquement qu’il y a bioaccumulation : • sil’organismevivantaétéexposédanssonpasséàdesconcentrations ambiantes plus importantes qu’actuellement, il peut exister une rémanence de cette contamination passée dans certains de ses tissus, induisant un déséquilibre apparent par rapport à la concentrationactuelleducontaminant dans l’environnement, plus faible qu’autrefois. Ce phénomène se produit lorsqu’une substance se fixe dans l’organisme, à une concentration inférieure ou égale à celle de la source d’origine, et y reste plus ou moins durablement selon la vitesse d’élimination de la substance. La rémanence peut également être observée dans des milieux abiotiques (sols ou sédiments) lorsque des processus physico-chimiques conduisent à fixer durablement une substance dans le milieu (par exemple, le césium dans certains sols argileux); • si l’organisme vivant est principalement exposé au contaminant via son alimentation et que celle-ci est exogène (venant d’une source extérieure au milieu de vie de l’organisme exposé), l’interprétation du facteur de concentration calculé à l’aide de la concentration du contaminant dans le milieu ambiant est biaisée ; il convient dans ce cas de calculer ce facteur à partir de la concentration mesurée dans les aliments avant de conclure sur une possible bioaccumulation. A la lumière des cas étudiés plus loin pour le tritium, les réserves exprimées ci-dessus concernant l’interprétation des facteurs de bioconcentration ont toute leur importance. 3 Origines naturelles et anthropiques du tritium Les principales origines du tritium présent dans l’environnement sont : (1) la production naturelle principalement d’origine atmosphérique ; (2) la libération de tritium lors d’essais aériens anciens d’armes nucléaires ; (3) les rejets des installations du cycle du combustible nucléaire civiles et militaires en fonctionnement normal et lors des phases de démantèlement ; (4) les rejets liés à son utilisation dans l’industrie biomédicale, et plus généralement aux activités de recherches (molécules marquées) ; (5) l’utilisation ancienne du tritium dans l’horlogerie et la fabrication de peinture luminescente. La quantité de tritium présente dans la biosphère a fortement augmenté lors des essais d’armes nucléaires dans l’atmosphère, entre 1945 et 1980. La décroissance radioactive a fait disparaître près de 90 % du tritium au cours de cette période. Aujourd’hui et pour les années à venir, les sources de tritium les plus importantes sont celles issues des rejets des installations du cycle du combustible nucléaire (réacteurs, traitement du combustible) et, dans le futur, celles des applications impliquant la fusion nucléaire. 3 1 Production naturelle de tritium Bien que sa période radioactive soit relativement courte, le tritium est présent à l’état naturel dans l’environnement. Il provient pour l’essentiel de l’action des rayonnements cosmiques sur l’azote, l’oxygène et l’argon de l’air. Environ99%du tritiumainsi produit se transforme en eau tritiée et s’intègre au cycle de l’eau (pluie, cours d’eau, océan, évaporation...). L’UNSCEAR (2000) a estimé que l’inventaire permanent du tritium naturel est d’environ 1,275.1018 Bq (3,5 kg) à l’échelle planétaire, avec une production annuelle de l’ordre de 7,2.1016 Bq (environ 200 g). La production tellurique, par réaction des neutrons issus de la fission spontanée de l’uranium, sur les traces de 6Li présentes dans les roches, est difficile à estimer avec exactitude, mais il semble qu’elle soit très petite devant la production atmosphérique (Belot et al., 1996). 2 Estimation réalisée sur la base de la décroissance radioactive de 1963 à 2007 appliquée à la quantité initiale de 650 kg. Figure 2.1 – Illustration de la bioaccumulation et de la bioamplification des PCB dans des organismes marins (IFREMER – www.ifremer.fr). La concentration dans le phytoplancton (premier maillon de la chaîne trophique) est nettement supérieure elle du milieu ambiant (eau) ; la concentration continue de croître dans les maillons suivants, traduisant une bioamplification via l’alimentation.

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