Contrôle n°201

DÉCEMBRE 2016 | N° 201 | CONTRÔLE 23 à notre échelle, de développer la culture du risque en France. Quelles sont vos propositions pour aller vers une culture citoyenne du risque ? Aller vers une responsabilisation des citoyens dans leur comportement face aux risques majeurs et le nucléaire en est un. Mais comment leur demander de se responsabiliser s’ils ne sont pas infor- més ? Comment peut-on demander à la population de bien se comporter si on ne lui explique pas ce qu’il faut faire ? Nous proposons d’organiser, à l’image de la « semaine de la science », de la « semaine de la culture » ou de la « journée sur la sécurité routière », une « journée de la sûreté nucléaire » en France. La sûreté nucléaire n’est pas un sujet tabou. Que l’on soit pour ou contre le nucléaire, à partir du moment où celui-ci existe et existera encore pendant plusieurs années, avec des enjeux de sûreté de plus en plus impor- tants, avec le vieillissement du parc… la population doit être informée sur ce qui est fait pour que cette sûreté soit assurée et sur la conduite à tenir si, malgré tout, un accident se produisait. Et il n’y a aucune raison que cette information soit limitée à un rayon de 10 ou 20 km autour des centrales. C’est tout le monde qu’il faut informer. Concernant la campagne de distribution de comprimés d’iode. Aujourd’hui, 50 % des habitants qui résident dans un rayon de 10 km autour des centrales sont allés chercher leurs comprimés en pharmacie. Les autres recevront leur boîte directement chez eux et devront se débrouiller avec. Nous, nous proposons de recruter des étu- diants en pharmacie, en médecine, pour qu’ils distribuent, directement à domicile, les boîtes de comprimés, avec des expli- cations. C’est ce que nous avions fait il y a 15 ans à Gravelines et nous avons obtenu un taux de pénétration de 95 % (les 5 % restant correspondent aux per- sonnes absentes de chez elles ou qui n’ont pas voulu des boîtes remises à domicile par les étudiants). Comment l'Anccli et les CLI sont- elles organisées pour favoriser l'information des populations ? L’ Anccli joue un rôle d’interface : nous faisons remonter les préoccupations des 35 CLI qui existent sur le territoire fran- çais et nous les informons des règles pré- conisées au niveau national. Les CLI sont souveraines sur la manière d’informer leur population. Elles s’organisent de façon différente en fonction, par exemple, du nombre d’habitants résidant sur leur territoire. Celui-ci peut varier de 5 000, 20000, voire 100000 habitants mais aussi en fonction de leur budget : certaines CLI fonctionnent aujourd’hui avec un budget de 150000 euros, d’autres ont à peine 5000 euros. Les CLI et l’Anccli disposent d’un budget accordé par l’État, via l’ASN, de 1 mil- lion d’euros par an : ce qui fait la modique somme de 70 centimes d’euros par an et par habitant situé dans les zones PPI de 10 km! Il faut pourtant un minimum de moyens financiers pour organiser des réu- nions, avoir des locaux, envoyer des invi- tations… La nouvelle loi TECV stipule par ailleurs que chaque CLI doit organi- ser au moins une fois par an une réunion publique pour informer la population. Certaines ont d’ailleurs déjà eu lieu en 2016. Cela exige un minimum d’organi- sation et de concertation avec le ministère de l’Intérieur, les préfets, les exploitants. Ce n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui, et les présidents de CLI se retrouvent, le plus souvent, seuls face à cette obligation et sans moyens supplé- mentaires. À cela s’ajoute maintenant l’évolution des PPI. En élargissant le périmètre d’information de 10 à 20 km, on passe par exemple au Bugey de 80000 à 1,2 million d’habitants. À Gravelines, on passe de 25 000 à 300000 habitants. Comment vont faire les CLI, si leur budget n’augmente pas ? Avec un PPI à 20 km, le budget qui leur est accordé par l’État se réduira à 15 centimes d’euros par an et par habitant concerné ! Lors de la confé- rence des CLI l’année dernière, j’avais déjà interpellé les parlementaires sur ce point. Nous attendons toujours les résultats du rapport sur le financement des CLI qui devait être présenté en juillet dernier… Les conclusions du comité scientifique de l’Anccli sur les PPI Par Suzanne Gazal, présidente du comité scientifique de l’Anccli Si l’accident de Three Mile Island en 1979 et la catastrophe de Tchernobyl en 1986 ont révélé la réalité du risque d’accident majeur dans un réacteur nucléaire, la question de la gestion d’une situation d’urgence radiologique n’a véritablement retenu l’attention du public qu’à l’occasion de la catastrophe de Fukushima en 2011. Dans un contexte à la fois de libération de l’information et de sensibilité croissante de la société civile, des interrogations ont émergé sur le contenu et la fiabilité en France des PPI : quelles sont les procédures et les « périmètres » de mise en sécurité des personnes et des biens en cas d’accident avec rejets radioactifs dans l’environnement ? Quel est le fondement et la justification de ces « périmètres », dont les accidents de Tchernobyl et Fukuschima par exemple ont montré le caractère totalement inadapté ? Les plans particuliers d’intervention prévoient la mise en œuvre d’un certain nombre de mesures de protection des populations. Ces mesures sont-elles suffisantes ? Leurs modalités de mise en œuvre satisfaisantes ? Comment en particulier l’iode stable, qui a vocation à protéger contre les rejets d’iode radioactif, serait-il mis à la disposition du public et comment serait-il administré ? Comment associer la société civile à l’élaboration et à la mise en œuvre des PPI ? Sollicité par l’Anccli, le comité scientifique a essayé de répondre avec précision à toutes ces questions et a fait à leur sujet de nombreuses propositions et recommandations 1 , avec pour objectif de contribuer à enrichir la réflexion du public, à faire évoluer la réglementation et à améliorer les plans particuliers d’intervention, contribuant ainsi à une meilleure protection des populations et de leur environnement en cas d’accident. 1. Le rapport du comité scientifique Les plans particuliers d’intervention (PPI) – Mesures de protection, rayons d’intervention, distribution préventive d’iode stable (115 pages) est disponible auprès de l’Anccli, accompagné d’un relevé de conclusions et recommandations (35 pages), ainsi que sur le site de l’Anccli. EN SAVOIR + Anccli.org Les publications du comité scientifique

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