Contrôle n°201

CONTRÔLE | N° 201 | DÉCEMBRE 2016 58 … et préparer le post-accident Le mardi 11 juin à 6h30, l’ASN confirme la reprise du refroidissement en eau du réacteur et la fin des rejets, annoncée une demi-heure plus tôt par l’exploitant. Débute alors la gestion post-accidentelle de la crise. L’ ASN applique les principes du Codirpa, publiés en 2012. Compte tenu de la cartographie de la contami- nation de l’environnement établie par l’IRSN, elle préconise : › › un périmètre d’éloignement de 3 km au sud-ouest et 1,5 km au sud de la centrale : les personnes résidant dans ce périmètre resteront éloignées pour une durée a priori longue ; › › une zone de protection de la population sur 21 km au sud- ouest, 3 km au nord-est et 13 km au sud : des actions de réduction de l’exposition y seront nécessaires ; › › une zone de surveillance renforcée des territoires, où devront être contrôlés notamment les denrées alimentaires et produits agricoles. En fin de matinée, suivant les recomman- dations de l’ASN, la préfecture lève la mise à l’abri des populations dans la zone des 10 km et met en œuvre les premières actions post-accidentelles: consignes de restrictions de commercialisation des denrées alimentaires et de gestion de l’eau potable et ouverture de centres d’accueil et d’information. À 15h, l’exercice s’achève et un premier bilan à chaud est conduit au sein des dif- férents centres de crise. S’entraîner à répondre aux médias Ce type d’exercice est aussi l’occasion de simuler la pression médiatique afin d’éprouver les capacités de communica- tion des acteurs. Différents canaux ont été utilisés: téléphone (appels de jour- nalistes), presse écrite (45 articles dans la presse internationale, nationale et régio- nale), télévision (8 heures de direct sur une chaîne d’information en continu fictive), radio (23 flashs fictifs) et Internet (une cin- quantaine de fausses dépêches AFP et une présence active sur les réseaux sociaux avec 42 contributeurs sur 44 comptes créés, etc.). Des représentants de l’ASN, de l’IRSN et de l’exploitant étaient présents au sein de la cellule communication de la CIC. Une bonne coordination est en effet capitale pour être à l’écoute des préoccupations de la population et des autres parties pre- nantes (pays frontaliers, etc.), leur délivrer une information transparente et continue, assurer l’homogénéité du discours. Les enseignements tirés L’exercice SEC NUC 2013 devait tes- ter la capacité de l’État à faire face à une crise nucléaire majeure dans le contexte du retour d’expérience de l’accident de Fukushima. Il devait notamment mettre en œuvre les dispositions du Plan natio- nal de réponse à un accident nucléaire ou radiologique majeur. Sur la stratégie de protection des populations Si le dimensionnement du périmètre de mise à l’abri est apparu approprié, sa durée était peu réaliste (maintien à l’abri des personnes pendant 36 heures). Plusieurs questions sont restées sans réponse concernant le ravitaillement et les moyens de couchages disponibles ou encore la possibilité de lever cette mise à l’abri plus tôt. La phase d’urgence a permis au ministère de l’Éducation nationale de tester l’efficacité des plans particuliers de mise en sûreté (PPMS) des établissements scolaires publics. Le travail sur table consacré à l’évacuation massive de population a mis à contribu- tion l’échelon zonal et a clarifié les enjeux qui découlent d’une évacuation de cette ampleur. Ce thème a ainsi été abordé par l’ensemble des départements lors de la déclinaison du guide Évacuation massive transmis aux préfectures en septembre 2014. Sur la stratégie de communication La communication locale s’est avérée dynamique et pertinente, tout comme celle émanant de l’exploitant, de l’ASN et de l’IRSN, dans leurs champs de compé- tences respectifs. Plusieurs points d’amélioration ont cependant été identifiés sur le fond des messages, notamment en ce qui concerne la vulgarisation et les représen- tations (graphiques, illustrations, com- paraisons) pour le grand public, le choix de certains termes techniques pouvant prêter à confusion, la multiplication des sigles inconnus du grand public et le manque d’information concrètes sur la situation. Globalement, la réponse des acteurs semblait davantage dimension- née pour une crise de nature technique plutôt que sociétale. Il y avait un déca- lage entre la réalité des faits et la posture de communication des acteurs, avec des discours empreints d’une teinte tech- nique ou administrative inaudible pour la population. Sur la stratégie de préparation à la gestion post-accidentelle Jouées pour la première fois, la sortie de phase d’urgence et la préparation à la ges- tion post-accidentelle ont mis en évidence la difficulté pour les non-spécialistes du nucléaire d’appréhender les concepts de base de la gestion post-accidentelle définis par le Codirpa. Un travail de pédagogie doit donc être conduit par les experts en amont des crises. Une problématique a par ailleurs été identifiée concernant l’articulation du zonage post-accidentel avec les limites administratives. En effet, les recomman- dations de zonage de l’ASN et les mesures qui les accompagnent sont appliquées par le préfet compétent. Ce dernier peut déci- der, pour éviter un découpage complexe de son territoire, d’étendre les zonages techniques pour les faire coïncider avec les limites administratives de son terri- toire. Durant l’exercice, deux communes ont fait l’objet de mesures d’éloignement pour l’ensemble de leurs habitants bien que la zone d’éloignement recommandée par l’ASN ne concernait que des parties réduites et inhabitées de leur territoire. Cette décision est plus simple à appré- hender pour la population et plus facile à appliquer par les autorités. L’exercice a également démontré la néces- sité d’aborder de façon opérationnelle certains sujets liés à la gestion post-acci- dentelle (conséquences d’un accident nucléaire majeur pouvant dépasser la limite d’un département, modalités de restriction et d’interdiction de consom- mation), au travers d’exercices spéci- fiques. Les services manquent en effet d’automatismes dans la préparation à la gestion post-accidentelle des évène- ments. Les enseignements tirés de l’exer- cice constituent à ce titre un complément utile à la doctrine Codirpa pour instruire le volet post-accidentel dans le cadre de la déclinaison territoriale du Plan natio- nal de réponse à un accident nucléaire ou radiologique majeur. Autant d’éléments pris en compte dans l’élaboration de l’exercice majeur organisé les 20 et 21 septembre 2016 sur le site Areva de La Hague. À l’heure où nous met- tons sous presse, il est encore trop tôt pour dresser le bilan de cet exercice. RETOUR D’EXPÉRIENCE Les exercices de crise

RkJQdWJsaXNoZXIy NjQ0NzU=