Rapport de l'ASN 2020

1. Le cadre juridique et technique du démantèlement 1.1  Les enjeux du démantèlement La réalisation dans les délais des opérations de démantèlement, souvent longues et coûteuses, constitue un défi pour les exploitants en matière de gestion de projet, de maintien des compétences ainsi que de coordination des différents travaux, qui font intervenir de nombreuses entreprises spécialisées. En effet, le démantèlement est plutôt caractérisé par une succession d’opérations que par un état de production, et donc par des risques évolutifs. Certains risques, notamment le risque de rejets importants hors du site, diminuent car la quantité de substances radioactives diminue. Mais les travaux réalisés, parfois au plus près des substances radioactives, présentent des enjeux de radioprotection importants pour les travailleurs. D’autres risques augmentent, comme le risque de dissémination de substances radioactives dans l’environnement ou certains risques classiques, comme les risques de chutes de charges liées aux manutentions de gros composants sur des chantiers en hauteur, d’incendies ou de brûlures lors de travaux par points chauds avec présence de matériaux combustibles, d’anoxie lors de chantiers confinés, d’instabilité de structures partiellement démontées, de risques chimiques durant les opérations de décontamination. L’un des enjeux majeurs du démantèlement d’une installation est lié à la production d’un grand volume de déchets au regard de celui lié au fonctionnement. Il est nécessaire d’apprécier l’ampleur et la difficulté des travaux dès que possible dans la vie des installations (dès la conception si possible), afin d’assurer le démantèlement des installations en toute sûreté et dans des délais aussi courts que possible. Le bon déroulement des opérations de démantèlement est également conditionné par la disponibilité des installations « support » au démantèlement (installations d’entreposage, de traitement et de conditionnement des déchets, installations de traitement d’effluents) et de filières de gestion adaptées à l’ensemble des déchets susceptibles d’être produits. Lorsque la disponibilité des exutoires finaux aux dates annoncées est remise en cause, les exploitants, de façon prudente, doivent mettre en place les installations nécessaires à l’entreposage sûr de leurs déchets, dans l’attente de l’ouverture de la filière de stockage correspondante. Ce point fait d’ailleurs l’objet de prescriptions dans le décret du 23 février 2017 établissant les prescriptions du Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs 2016‑2018 (PNGMDR) (voir chapitre 14). L’ASN considère ainsi que la gestion des déchets issus des opérations de démantèlement constitue un point crucial pour le bon déroulement des programmes de démantèlement (disponibilité des filières, gestion des flux de déchets). Ce sujet fait l’objet d’une attention particulière lors de l’évaluation des stratégies de démantèlement et de gestion des déchets établies par le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), EDF et Orano (voir point 4). Le terme de démantèlement couvre l’ensemble des activités, techniques et administratives, réalisées après l’arrêt définitif d’une installation nucléaire à l’issue desquelles l’installation peut être déclassée, opération administrative consistant à retirer l’installation de la liste des installations nucléaires de base (INB). Ces activités comprennent l’évacuation des matières radioactives et des déchets encore présents dans l’installation et les opérations de démontage des matériels, composants et équipements utilisés pendant le fonctionnement. L’exploitant procède, ensuite, à l’assainissement des locaux et des sols et réalise, éventuellement, des opérations de destruction de structures de génie civil. Les opérations de démantèlement et d’assainissement visent à atteindre un état final prédéfini pour lequel la totalité des substances dangereuses, y compris non radioactives, a été évacuée de l’installation nucléaire. Le démantèlement d’une installation nucléaire est prescrit par décret pris après avis de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Cette phase de vie des installations est caractérisée par une succession d’opérations souvent longues, coûteuses, produisant des quantités massives de déchets. Les installations en démantèlement subissent des changements continus, qui modifient la nature des risques et constituent des défis pour les exploitants en matière de gestion de projet. En 2020, 36 installations nucléaires de tout type (réacteurs de production d’électricité ou de recherche, laboratoires, usine de retraitement de combustible, installations de traitement de déchets, etc.) étaient arrêtées ou en cours de démantèlement en France, ce qui correspond à plus du quart des INB en exploitation. L’ASN instruit, au 31 décembre 2020, 18 dossiers de démantèlement d’installation définitivement arrêtée, dont le démantèlement n’a pas été encore prescrit ou dont les conditions de démantèlement sont substantiellement modifiées. L’année 2020 a notamment été marquée par l’arrêt des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim d’EDF en février et juin 2020, suivi du dépôt du dossier de démantèlement de l’INB. Le démantèlement des installations nucléaires de base 13 344 Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2020

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