Les sites et sols pollués par des substances radioactives

Site pollué par des substances radioactives : site qui, du fait d'anciens dépôts de substances ou déchets radioactifs, d'utilisation ou d'infiltration de substances radioactives ou d'activation radiologique de matériaux, présente une pollution radioactive susceptible de provoquer une nuisance ou un risque durable pour les personnes ou l'environnement. (Annexe 13-7 du code de la santé)

Un sujet sensible

Les pollutions par les substances radioactives ne représentent qu’une très faible part des sites pollués en France. Une cinquantaine de sites pollués par des substances radioactives provenant d'activités industrielles passées recensés sur le territoire et "appelant une action des pouvoirs publics à titre préventif ou curatif"[1]. Ces pollutions posent des problèmes spécifiques:

  • l’émotion qu'elles suscitent est importante. À l’éventuel risque sanitaire s’ajoute celle due à la dépréciation des biens immobiliers ;
  • les coûts d’intervention et de gestion des déchets qui en sont la conséquence apparaissent élevés au regard notamment d’autres types de pollution ;
  • certains déchets ne disposent pas de filière d’élimination.

La prise en compte et le traitement des sites pollués par des matières radioactives est une activité prioritaire pour l’ASN qui intervient sur ce sujet depuis 2002.

L’héritage du passé

Cette pollution peut résulter d’activités industrielles, médicales ou de recherche impliquant des substances radioactives. La pollution peut concerner les lieux d’exercice de ces activités ainsi que leur voisinage, immédiat ou plus éloigné. Les activités concernées sont, en général, des activités nucléaires telles que définies par le code de la santé publique[2], soit des activités concernées par la radioactivité naturelle, visées par l’arrêté du 25 mai 2005. Toutefois, la plupart des sites pollués par des substances radioactives renvoient à des activités industrielles ou artisanales du passé, à une époque où la perception des risques liés à la radioactivité n’était pas la même qu’aujourd’hui.

Les principaux secteurs industriels à l’origine des pollutions radioactives (aujourd’hui) recensées sont :

  • l’extraction de radium pour les besoins de la médecine ou des laboratoires pharmaceutiques, depuis le début du XXème siècle jusqu’à la fin des années 1930 ;
  • la fabrication et l’application de peintures radioluminescentes pour la vision nocturne ;
  • les industries exploitant des minerais tels que la monazite (pour la fabrication des pierres à briquet autrefois, et désormais pour l'industrie des terres rares) ou les zircons (fonderie, cristallerie, céramique, verrerie, abrasifs...) .

Le cas particulier du radium

Dans l’histoire scientifique de la radioactivité, le radium tient une place à part. Découvert par les époux Curie en 1898, il a été très utilisé jusque dans les années 1960 avant d’être abandonné.

En France, dans les années 1930, on trouve en pharmacie la crème Tho-Radia vendue selon la formule du Dr Alfred Curie (un médecin homonyme des chercheurs Pierre et Marie Curie).
Cette préparation qui contient du thorium et du radium en faible quantité est censée effacer les rides du visage. © Archives Robin des Bois

Que fait l’ASN ?

Le rôle de l’ASN

En matière de gestion des sites et sols pollués, l'ASN :

  • valide les objectifs d'assainissement proposés dans le cadre de la réhabilitation des sites, afin d'assurer la radioprotection du public et des futurs usagers des sites une fois qu'ils sont dépollués ;
  • fixe les règles techniques auxquelles doit satisfaire l'élimination des effluents et des déchets contaminés par les radionucléides ou susceptibles de l'être du fait d'une activité nucléaire ;
  • s'assure que les sites identifiés comme pollués sont mis en sécurité pour le public et pour l'environnement ;
  • participe à l’information des citoyens ;
  • inspecte les sites en réhabilitation afin de vérifier que la protection des travailleurs et des riverains est assurée pendant la phase de travaux.

L'ASN par son action quotidienne œuvre afin qu'il n'y ait pas dans le futur de sites et sols pollués dus à des activités actuelles.

La doctrine de l’ASN

Début octobre 2012, l’ASN a formalisé les principes de base de sa doctrine en matière des sites pollués par des substances radioactives :

  • la démarche de référence à retenir est, lorsque cela est techniquement possible, d'assainir complètement les sites radio contaminés, même si l’exposition des personnes induite par la pollution radioactive apparait limitée ; il convient d'aller aussi loin qu'il est raisonnablement possible dans le processus d'assainissement ;
  • en application du principe pollueur-payeur, les responsables de la pollution (responsables solvables) sont également responsables des opérations de réhabilitation du site pollué et de l'élimination des déchets qui résultent de ces opérations ;
  • l’exposition aux rayonnements ionisants devant être maintenue au niveau le plus faible possible, l’objectif premier est d’enlever au maximum la pollution radioactive.
  • le maintien sur place de la contamination ne doit pas être la solution de référence, sauf dans les cas où les volumes de déchets à excaver sont trop importants pour permettre d’ envisager l’assainissement complet du site.
  •  le public doit être associé au choix de la solution à retenir.

[1] http://basol.developpement-durable.gouv.fr

[2] Le code de la santé publique (Art. L.1333-1) définit les « activités nucléaires » comme « les activités comportant un risque d’exposition des personnes aux rayonnements ionisants, émanant soit d’une source artificielle, qu’il s’agisse de substances ou de dispositifs, soit d’une source naturelle lorsque les radionucléides naturels sont traités ou l’ont été en raison de leurs propriétés radioactives, fissiles ou fertiles ».

Que dit la loi ? Quelle réglementation s'applique à la gestion des sites et sols pollués par de la radioactivité ?

La loi de programme du 28 juin 2006 a confié à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) une mission de service public pour aider au traitement des sites dont le responsable est défaillant (article L-542-12 du code de l’environnement). Une vingtaine de sites industriels est aujourd’hui concernée en France.

En 2007, des évolutions importantes ont eu lieu, que ce soit sur les procédures applicables pour la gestion de ces sites ou sur les modalités de financement des sites dont le responsable est défaillant. (L’application de cette disposition a notamment conduit à la mise en place d’une Commission nationale des aides dans le domaine radioactif (Cnar) à laquelle l’ASN participe).

En application du principe « pollueur‑payeur» inscrit dans le code de l’environnement, les responsables de la pollution (exploitants ou particuliers lorsqu’ils sont solvables) financent les opérations de réhabilitation d’un site pollué et d’élimination des déchets qui résultent de ces opérations.

Lorsque la pollution est due à une installation relevant d’une police spéciale (INB, ICPE ou activité nucléaire relevant du code de la santé publique), la gestion des sites pollués relève du même régime de contrôle. Dans les autres cas, le préfet du département contrôle les mesures prises en matière de gestion du site pollué. (Décret n° 2018-434 du 4 juin 2018)

En cas de défaillance des responsables, le site pollué est alors dit « orphelin » et l’Andra propose au préfet du département, au titre de sa mission de service public , la mise en œuvre des mesures durables de protection des populations et de réduction aussi bas que raisonnablement possible de leur exposition, principalement par des actions de dépollution des parcelles concernées et l'institution de servitudes d'utilité publique (R. 1333-95 du CSP). L’État assure le financement de leur assainissement, par une subvention publique prévue à l’article L. 542‑12‑1 du code de l’environnement. La Commission nationale des aides dans le domaine radioactif (CNAR) émet des avis sur l’utilisation de cette subvention, tant sur les priorités d’attribution des fonds que sur les stratégies de traitement des sites pollués et sur les principes de prise en charge aidée des déchets.

En savoir plus

Peut-on retirer la pollution radioactive ?

La dépollution des sites pollués par des substances radioactives est une procédure souvent longue qui implique plusieurs acteurs.

Lorsque ces sites sont encore en activité, elle est à la charge de l’exploitant, sur le principe du pollueur-payeur défini à l'article L.110-1 du Code de l'environnement et repris dans la doctrine de l'ASN en matière de gestion des sites et sols pollués par des substances radioactives. Le responsable de la pollution d'un site doit en effet, en vertu de ce principe, dès lors qu'il est solvable et qu'il n'y a pas prescription, assurer le financement des opérations d'assainissement et de réaménagement du site pollué, jusqu'à l'élimination des déchets et la mise en œuvre des dispositions éventuellement prescrites par l'autorité administrative (surveillance de l'environnement, interdiction d'accès, servitudes...).

Lorsque le responsable est défaillant (ce qui arrive fréquemment lorsque le site est très ancien ), c’est à l'ANDRA d’assurer la remise en état du site, sur réquisition publique, conformément à l'article L542-12 du Code de l'environnement (article 14 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006).

La démarche

Le diagnostic

La phase de diagnostic constitue le socle sur lequel repose toute la démarche de gestion d'un site potentiellement pollué. Cette phase de recueil des connaissances est primordiale et doit être menée de façon suffisamment détaillée pour permettre :

  • la caractérisation précise de la pollution;
  • la définition des objectifs d'assainissement;
  • la définition des modalités de prise en charge des déchets susceptibles d'être produits;
  • l'évaluation du coût prévisionnel des différentes solutions de gestion proposées;
  • l'appréciation sur la robustesse et la pérennité de ces solutions.

 La réhabilitation

 Plusieurs acteurs sont impliqués :

  • L'exploitant ou le propriétaire;
  • L'IRSN (s'il est missionné par l'ASN) ou tout autre prestataire missionné par l'ASN ; il se charge des levées de doutes et de l'évaluation des doses reçues;
  • L’ANDRA et des entreprises habilitées s’occupent de la caractérisation et de la réalisation des travaux;
  • La préfecture, qui bénéficie des conseils de l’ASN ; elle a la responsabilité des mesures de précaution prises pour sécuriser le site;
  • L'ARS (voire l'INVS en cas d'étude épidémiologique) peut aussi intervenir avec l’ASN, lorsqu’un suivi sanitaire est nécessaire.

Un exemple de réhabilitation et d'assainissement complet ?

La dépollution complète peut être envisagée, comme c'est l'objectif de l'assainissement du site du CEA Saclay dit "L'Orme des merisiers"

Même si la dépollution reste l’objectif ultime, elle n’est toutefois pas toujours réalisable : parce que les travaux pour dépolluer complètement le site pourraient exposer travailleurs et riverains à une radioactivité trop élevée à la suite du bilan coût-avantage, ou parce que la quantité de déchets radioactifs est trop élevée pour être gérée conformément à la doctrine de l'ASN[1]. Dans ce cas, une politique de gestion suivant l’usage et la valorisation du site peut être définie.

Si le retrait le plus poussé possible de la pollution constitue l'objectif premier, en particulier en cas d'usage d'habitation, pour certains cas justifiés[1], notamment lorsque les déchets engendrés sont trop importants ou sans filière d'élimination clairement définie, il peut être envisagé de ne pas procéder à une dépollution maximale, si l'impact dosimétrique résiduel reste acceptable pour l'usage prévu;

Les activités en cours, à la différence des activités anciennes qui ont occasionné des pollutions, doivent désormais répondre aux obligations de prévention prévues dans le cadre de la législation sur les installations classées (ICPE)[2]. Dans ce cadre, toute pollution des milieux devra conduire à la mise en œuvre de mesures de réparation des dommages pour un retour à l’état antérieur.

La CNAR

Avec la parution de la loi n°2006-739, il a été confié à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) une mission de service public pour contribuer à la remise en état des sites présentant une pollution radioactive lorsque les responsables sont défaillants. Ainsi en application de l’article D.542-15 du code de l’environnement, le conseil d’administration de l’ANDRA a mis en place une Commission nationale des aides dans le domaine radioactif (CNAR).

Cette Commission pluraliste constitue un outil de pilotage et d’aide à la décision pour l’attribution des subventions publiques de remise en état des sites pollués par des substances radioactives (article L.542-12-1 du code l’environnement), et en particulier sur :

  • « les priorités d’attribution des fonds »,
  • « les stratégies de traitement des sites de pollution radioactive »,
  • « les principes de prise en charge aidée des déchets radioactifs »,
  • « les dossiers individuels qui lui sont soumis ».

 

L’objectif de la CNAR vise à émettre un avis sur la stratégie d’intervention de l’Andra. Eu égard aux compétences nécessaires pour traiter des sujets de cette Commission, la composition de la CNAR est fixée comme suit :

Membres de droit :

  • « le directeur général de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs ou son représentant ; »
  • « le directeur général de l'énergie et du climat ou son représentant » ;
  • « le directeur général de la prévention des risques ou son représentant » ;
  • « le président de l'Autorité de sûreté nucléaire ou son représentant » ;
  • « le président de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie ou son représentant » ;
  • « le président de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire ou son représentant » ;
  • « l'administrateur général du Commissariat à l'énergie atomique ou son représentant » ;
  • « le président de l'Association des maires de France ou son représentant ».

 

Membres nommés par arrêté des ministres chargés de l'énergie, de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (mandat renouvelable de quatre ans) :

  • le président de la Commission  ;
  • deux représentants d'associations agréées pour la protection de l'environnement ou leurs suppléants ;
  • un représentant d'un établissement public foncier ou son suppléant.

Les organisations membres de la CNAR doivent nommer un titulaire et un ou plusieurs suppléants, étant entendu que le ou les suppléants participent à la réunion en lieu et place du titulaire Chaque organisation ne peut être représentée que par un membre en séance, lequel dispose du droit de vote de son organisation.

Depuis sa création, la CNAR s'est réunie sur un rythme trimestriel. Les dossiers sont examinés individuellement, afin que les avis rendus soient adaptés aux spécificités des projets. Par exemple, la CNAR tient compte du caractère plus ou moins sensible d'un site pollué (école, résidence…) ou de l'intérêt pour la collectivité de reconquérir un terrain pollué pour lui redonner un usage (terrains situés en cœur de ville...). Toutefois, la CNAR entend garantir l'équité des avis qu'elle rend sur des sujets récurrents en se dotant d’un règlement intérieur sur la base de son retour d’expérience. Ce règlement intérieur indique les modalités de prise en charge gratuite des objets radioactifs anciens, le financement des travaux de rénovation après assainissement, ainsi que le relogement temporaire des personnes dont l'habitation est en cours de dépollution, ou encore sur les objectifs d’assainissements à mettre en œuvre. Enfin, la CNAR se consacre également au suivi des dossiers sur lesquels elle s'est prononcée même si elle n’en assure pas le financement. Dans ce but, un point sur l’avancement des chantiers lui est présenté au cours de ses séances.

 

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[1] Extraits des « Principes de base de la doctrine de l’ASN en matière de gestion des sites et sols pollués par des substances radioactives » adoptée par le collège de l’ASN le 4 octobre 2012 :

  • b. Dans les cas où les volumes de déchets qui seraient produits par un assainissement complet du site sont trop importants pour envisager leur prise en charge dans des centres de stockage dédiés, il peut être acceptable de maintenir des pollutions radioactives sur le site sous réserve de s’assurer que l’impact dosimétrique résiduel reste acceptable pour un usage actuel et un usage futur du site, le cas échéant moyennant des restrictions d’usage. Cette règle s’applique par exemple au cas des terrils de phosphogypses ou de cendres de combustion ainsi qu’au cas des verses à stériles d’exploitation minière d’uranium.
  • c. Dans les cas justifiés où les volumes de déchets qui seraient produits par un assainissement complet du site restent gérables dans des filières dédiées mais où les exutoires nécessaires ne sont pas disponibles aujourd’hui, il peut être acceptable que l’assainissement soit partiel. Il faut alors privilégier des solutions techniques permettant de reprendre facilement les déchets ultérieurement. Les solutions consistant à maintenir les pollutions sous des constructions et à gérer les impacts par des dispositions constructives sont à proscrire, sauf cas particuliers dûment justifiés.

[2] Voir « La gestion suivant l’usage ne constitue pas un droit de polluer », Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie - http://www.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=article&id_article=22092

Ces sites présentent-ils un risque ?

Les sites pollués par des substances radioactives constituent une source de radioactivité s’ajoutant à la radioactivité naturelle à laquelle chacun est exposé. Cette radioactivité ajoutée est le plus souvent très faible et peut présenter dans des cas particuliers des effets stochastiques (aléatoires).

Cette radioactivité naturelle est omniprésente, et provient principalement de deux sources :

  • la première est d'origine terrestre (rayonnements d’origine tellurique), liée à la désintégration d’atomes radioactifs (radionucléides) qui sont naturellement, présents dans la croûte terrestre (potassium 40, uranium 238 et 235, thorium 232)
  • la deuxième est d'origine spatiale (rayonnements d’origine cosmique), liée à la désintégration des particules de haute énergie au contact des composants de l’atmosphère. Ces particules qui sillonnent l’atmosphère en permanence produisent des radionucléides comme le carbone 14, le sodium 22, le tritium et le béryllium 7.

S’y ajoute une radioactivité dite 'naturelle renforcée" liée à l’extraction ou l’exploitation industrielle de matières premières naturellement riches en radionucléides.

Quels risques pour la santé?

À sa découverte, la radioactivité n’était pas supposée dangereuse pour l’homme (le radium était même considéré comme un produit "miracle" qui entrait dans la composition des crèmes antirides). L’impact de certains radionucléides sur la santé est aujourd'hui identifié de manière plus précise.

La présence d’un sol pollué par des substances radioactives expose hommes, animaux et environnement selon diverses voies. Les radionucléides peuvent entrer dans l’organisme par ingestion, inhalation ou contact cutané.

Cycle de transmission de la pollution
Les radionucléides du sol pollué peuvent être ingérés directement par des animaux broutant l’herbe qui y pousse ou des enfants qui y jouent. Ils peuvent aussi être mis au contact de la peau des personnes amenées à se promener ou à travailler sur ces sites. Ils peuvent aussi contaminer l’eau des nappes phréatiques et des rivières (baignades, pêche, arrosage des fruits et légumes ou eau potable). Ils peuvent en outre contaminer l’air que nous inhalons

Depuis sa découverte, les effets de la radioactivité sur l'homme et son environnement sont étudiés en laboratoire  et auprès des populations exposées.

Les rayonnements ionisants peuvent présenter un risque pour la santé : ils peuvent modifier, altérer ou casser l’ADN qui se trouve à l’intérieur de nos cellules. Or l’ADN est constitué de tous les "gènes" qui déterminent le fonctionnement de nos cellules et qui sont transmis à notre descendance.

En cas d’altération de l’ADN, 3 scénarios ultérieurs sont possibles :

  • L’ADN se répare correctement, car nos cellules ont une aptitude naturelle à réparer les lésions de l’ADN ;
  • L’altération aboutit à la mort de la cellule, immédiate ou différée, avec des effets biologiques visibles variant selon la dose reçue, comme un érythème ou des brûlures, une radio dermite, une radionécrose ou une cataracte, voire la mort (effets déterministes) ; les effets déterministes n’apparaissent qu’à partir d’une dose estimée à environ 100 mSv ; ce seuil peut varier avec la radiosensibilité des personnes.
  • L’altération n’aboutit pas à la mort de la cellule, mais réparée de façon incomplète, peut conduire la cellule à ne plus fonctionner correctement, voire même à perturber le fonctionnement des autres cellules. L’altération peut n’avoir aucun effet immédiat, mais se manifester ultérieurement sous forme d’un cancer (effets stochastiques, probabilistes ou aléatoires). Ces effets ont été mis en évidence par des études épidémiologiques (études statistiques des populations, par exemple celle des mineurs dans les mines d’uranium). Le risque de cancer est principalement lié à la sensibilité spécifique de l’individu.

Que fait l’ASN ?

Les objectifs de la radioprotection, à l’échelle internationale, sont de réduire les doses d’exposition aux rayonnements ionisants, afin d’éviter l’apparition des effets déterministes et de réduire les probabilités d’apparition de cancers radio-induits (effet aléatoires).

L’objectif prioritaire de l’ASN est de protéger le public et l’environnement des risques liés aux sites et sols pollués par des substances radioactives. Aussi, l’exposition des personnes aux rayonnements ionisants induite par des sites pollués, doit être maintenue au niveau le plus faible qu'il est raisonnablement possible d'atteindre compte tenu de l'état des connaissances ainsi que des techniques et des facteurs économiques et sociaux.

Concernant la gestion des sites et sols polluées, l’ASN recommande, lorsque cela est techniquement possible, d’assainir complètement les sites radiocontaminés, même si l’exposition des personnes, induite par la pollution radioactive, apparaît limitée. L’ASN considère également que le maintien en place de la pollution ne doit pas être la première solution à adopter pour gérer les sites pollués par des substances radioactives.

Dans l’hypothèse où l’assainissement complet poserait des difficultés de mise en œuvre, il convient en tout état de cause d’aller aussi loin que raisonnablement possible dans le processus d’assainissement et d’apporter aux autorités compétentes des éléments, d’ordre technique ou économique, justifiant que les opérations d’assainissement ne peuvent être davantage poussées et sont compatibles avec l’usage établi ou envisagé du site.

Où se trouvent les sites radioactifs en France ?

Une cinquantaine de sites historiques ont été ou sont pollués par des matières radioactives en France.

Comme tous les sites industriels, la plupart de ces sites étaient situés en périphérie des centres urbains. Après fermeture, le terrain des « friches industrielles » a pu être recouvert par des constructions (écoles, maisons, etc…) années après années. 

Les usines Bayard, à Saint-Nicolas d’Aliérmont (76) , où étaient fabriqués des réveils matins et des cadrans pour l'aviation au moyen de peintures luminescentes contenant des produits radioactifs (radium et tritium). © ASN

Que fait l'ASN ?

Le rôle de l’ASN est de s'assurer que les sites identifiés comme radiocontaminés sont mis en sécurité pour le public et pour l'environnement. L’ASN participe à l'information des citoyens.

En savoir plus

Qu’est-ce qu’un site pollué par la radioactivité ?

Quelques définitions

Site pollué par des substances radioactives : site qui, du fait d'anciens dépôts de substances ou déchets radioactifs, d'utilisation ou d'infiltration de substances radioactives ou d'activation radiologique de matériaux, présente une pollution radioactive susceptible de provoquer une nuisance ou un risque durable pour les personnes ou l'environnement. (Annexe 13-7 du code de la santé)

Une substance radioactive est définie comme toute « substance qui contient des radionucléides, naturels ou artificiels, dont l’activité ou la concentration justifie un contrôle de radioprotection» (article L. 542-1-1 du Code de l’environnement).

Les terrains concernés par ce type de pollution couvrent un large éventail : terrains industriels en friches ou encore partiellement (voire totalement) exploités, sites historiques liés notamment à l'extraction du radium, reconvertis en propriétés publiques ou privées. Concernant les terrains militaires, l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND) est seule compétente pour leur dépollution.

A quoi est due cette pollution ?

La pollution est le plus souvent historique. Au siècle dernier, de nombreuses industries et commerces utilisaient en effet des substances radioactives, sans se préoccuper du fait, encore ignoré, que la radioactivité pouvait à certaines doses être dangereuse pour la santé humaine et contaminer les lieux pendant longtemps.

 Ces sites, sur lesquels des substances radioactives ont pu jadis être utilisées, sont pour certains toujours en activité, voire habités.

Les substances radioactives continuent d’être utilisées aujourd’hui, notamment pour la production d’énergie ou dans la médecine. La réglementation contraint les exploitants à prendre en charge la pollution qui résulte de leurs activités, sur le principe du pollueur-payeur inscrit dans le code de l’environnement.

Les principaux secteurs industriels concernés sont :

  • la production de radium et plus récemment des molécules marquées (carbone 14, ...) pour la médecine ou les laboratoires pharmaceutiques ;
  • la fabrication et l’application de peintures radioluminescentes (radium puis tritium) pour la vision nocturne ;
  • l'extraction de monazite pour les pierres à briquet (thorium) ou plus récemment pour l'extraction des zircons pour des abrasifs ;
  • la production d’engrais phosphatés, la fabrication d’acide phosphorique, la production d’énergie par les centrales thermiques à charbon ou encore l’extraction minière d’uranium ont pu ou peuvent générer des résidus radioactifs.

Pollutions historiques : la saga du radium

Qu’est-ce que le radium?

Le radium a été découvert par Pierre et Marie Curie en 1898. C’est un métal alcalino-terreux (symbole : Ra ; numéro atomique : 88). Il est présent en faible quantité dans la croûte terrestre et présente plusieurs isotopes, tous radioactifs. Le plus courant, le radium 226 (Ra-226) est extrait des minerais d’uranium (il fait partie de la chaîne de désintégration naturelle de l’uranium). Sa période radioactive ou temps de demi-vie est de 1 600 ans (période pendant laquelle sa radioactivité diminue spontanément de moitié). Il est émetteur alpha et gamma. Le produit de sa désintégration est le radon, un gaz radioactif, qui donne à son tour naissance à des éléments radioactifs.

A quoi servait le radium?

Le radium a été largement utilisé pendant plus de 60 ans dans les domaines médicaux et industriels. Les principales applications ont été thérapeutiques (brachythérapie avec des aiguilles de radium) ou cosmétiques (crèmes antirides au radium).

En France, dans les années 1930, on trouve en pharmacie la crème Tho-Radia vendue selon la formule du Dr Alfred Curie (un médecin homonyme des chercheurs Pierre et Marie Curie).
Cette préparation qui contient du thorium et du radium en faible quantité est censée effacer les rides du visage. © Archives Robin des Bois

Le radium a été également utilisé en raison de ses qualités photo luminescentes pour des peintures destinées à l’horlogerie, à l’aviation et aux dispositifs de signalisation de secours, ainsi que pour la conception de paratonnerres radioactifs.

Affiche publicitaire pour la vente d’aiguilles au radium (elles équiperont de nombreux hôpitaux entre 1910 et 1930) et objets radioactifs à usage médical : compresse au radium (autrefois utilisée pour les lombalgies) ; fontaine au radium. Ce type d’objets est actuellement pris en charge par l’ANDRA. @ ANDRA DR @Archives robin des Bois @ droits réservés

Quel est le problème aujourd’hui?

Depuis 1960, l’utilisation du radium dans les domaines médicaux ou industriels est arrêté. Les sites où il a été utilisé (horlogeries, laboratoires...) peuvent encore être pollués (les déchets se dégradent lentement) et nécessiter des actions d’assainissement afin de réduire les risques pour la santé et l’environnement. Les exploitants responsables des pollutions sur ces sites sont pour la plupart défaillants (décédés, insolvables…), c’est à dire qu’ils ne sont plus en mesure d’assumer leur responsabilité d’exploitant, celle-ci reposant notamment sur le principe pollueur-payeur. Depuis les années 1990, des actions de dépollution de ces anciens sites ont été entreprises par l’État.

L’opération Diagnostic radium était une opération gratuite pour les occupants des locaux concernés par une pollution radioactive historique. Cette opération consistait à réaliser un diagnostic afin de rechercher, par des mesures de la radioactivité, la présence éventuelle de traces de radium ou d’en confirmer l’absence. Ce diagnostic était  réalisé par une équipe de spécialistes de l’IRSN, appui technique de l’ASN, accompagnés par un référent ASN. A l’issue de ce diagnostic, les occupants étaient informés de l’état radiologique des locaux et des expositions éventuelles auxquelles ils avaient pu être soumis.. En cas de détection de traces de pollution, en accord avec les propriétaires, des opérations de réhabilitation étaient réalisées gratuitement puis une attestation, présentant les résultats de la réhabilitation des locaux, était remise à chaque personne concernée.

L'opération Diagnostic radium a été lancée en Ile-de-France en 2010, sous la responsabilité du préfet de la région Ile-de-France, du préfet de Paris, et avec la coordination opérationnelle de l'ASN. Cette opération a concerné 84 sites. L'État a décidé de réaliser gratuitement les diagnostics afin de détecter et, le cas échéant de traiter, les pollutions au radium héritées du passé.

A la fin de l’année 2016, sur 36 sites examinés, huit sites étaient exclus car les immeubles étaient trop récents pour présenter une pollution radioactive, par rapport à l'époque où du radium avait pu être manipulé. Au total plus de 430 diagnostics de locaux et de sols ont été réalisés sur 28 sites; dont 21 diagnostics ont mis en évidence des traces de radium dans les locaux qui ont fait l'objet d'opérations de réhabilitation. Il est à noter que les niveaux mesurés étaient faibles et l'exposition radiologique des occupants ne présentait pas d'enjeu sanitaire.

En 2020, l’ANDRA a annoncé à la Commission nationale des aides dans le domaine radioactif (CNAR) que les chantiers de réhabilitation engagés à l’issu des diagnostics de 2016 (4 sites) seraient terminés en 2021.

A la suite de la parution du décret n° 2018-434 du 4 juin 2018, une nouvelle organisation institutionnelle doit être mise en place pour reprendre les opérations de diagnostic concernant les 156 sites en France potentiellement pollués par des substances radioactives et répertoriés actuellement dans l’inventaire national de l’ANDRA.

Quelques substances radioactives responsables de pollutions historiques

D’autres substances dont la dégradation conduit à des substances radioactives ont été utilisées par l’industrie.

Le thorium permet ainsi de marquer des molécules utilisées par l’industrie chimique, en particulier dans le domaine médical, où il a été utilisé entre 1928 et 1955 sous forme de dioxyde de thorium (le Thorotrast, un produit de contraste utilisé en radiologie pour les artériographies) et entre 1944 et 1951, pour le traitement de certaines maladies comme la tuberculose ou la spondylarthrite ankylosante ;le thorium est présent dans :

  • la monazite : un minerai qui a permis de fabriquer des pierres à briquet, dont la production génère des déchets contenant du thorium (ces déchets ont longtemps été considérés comme inertes). Ils ont pu être réutilisés comme matériaux de remblaiement à proximité des sites, générant des pollutions radioactives ;
  • les zircons : le thorium est également présent dans les zircons, ainsi que des terres rares. Le zirconium est utilisé en métallurgie en vue de réaliser des alliages résistants aux chocs thermiques et à la corrosion ; ces alliages sont utilisés dans les industries chimique, nucléaire et aéronautique, ainsi que dans certains usages en fonderie, verrerie, cristallerie, céramique, etc.

Le tritium a été utilisé pour la fabrication des peintures thermoluminescentes (cadrans d'horloges, etc.).

Quelques radioéléments artificiels tels que l'américium 241 (utilisé dans la fabrication des paratonnerres radioactifs ou les détecteurs de fumée) ou le cobalt sous forme de 60Co (isotope radioactif du cobalt utilisé dans l’industrie).

Tête de paratonnerre radioactif au radium 226 © droits réservés

Que fait l’ASN ?

L’ASN fixe les règles techniques auxquelles doit satisfaire l'élimination des effluents et des déchets contaminés par les radionucléides ou susceptibles de l'être du fait d'une activité nucléaire.Elle valide les objectifs d’assainissement proposés dans le cadre de la réhabilitation des sites, afin d'assurer la radioprotection du public et des futurs usagers des sites une fois qu’ils sont dépollués.