L’ASN fixe à EDF des exigences complémentaires pour la mise en place du "noyau dur"

Publié le 23/01/2014 à 13:00

Note d'information

Le 21 janvier 2014, le collège de l’ASN a adopté 19 décisions fixant des exigences complémentaires pour la mise en place du "noyau dur" post Fukushima sur les centrales nucléaires d’EDF.

Ces décisions précisent les objectifs et les éléments constituant ce "noyau dur", qui devra comprendre des dispositions pour :

  • prévenir un accident grave affectant le cœur du réacteur ou la piscine d’entreposage du combustible irradié ;
  • limiter les conséquences d’un accident qui n’aurait pu être évité, avec pour objectif de préserver l’intégrité de l’enceinte de confinement sans ouverture du dispositif d’éventage. Cet objectif de limitation des conséquences d’un accident s’applique à l’ensemble des phases d’un accident ;
  • permettre à l’exploitant d’assurer ses missions de gestion de crise.

Ce "noyau dur" doit être aussi indépendant que possible des dispositifs existants, notamment pour ce qui concerne le contrôle-commande et l'alimentation électrique.

Ces décisions précisent les règles de conception à retenir pour les matériels du "noyau dur". Ces règles doivent être conformes aux normes les plus exigeantes. Enfin, elles conduiront EDF à retenir des aléas notablement majorés à retenir pour les matériels du "noyau dur", en particulier pour le séisme et l’inondation.

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1-Refroidissement du réacteur 2-Refroidissement de la piscine  3-Refroidissement du bâtiment réacteur     ©ASN

La mise en place d’un "noyau dur" a été prescrite par l’ASN le 26 juin 2012, à l’issue de l’analyse des conclusions des évaluations complémentaires de sûreté (ECS) qu’elle avait imposées afin de prendre en compte le retour d’expérience de l’accident de Fukushima Daiichi survenu le 11 mars 2011. Le concept de "noyau dur" vise à disposer de structures et équipements résistant à des évènements extrêmes assurant les fonctions vitales pour la sûreté du réacteur. Il s’agit de protéger les matériels nécessaires à la maîtrise des fonctions de sûreté vis-à-vis d’aléas notablement supérieurs à ceux retenus pour le dimensionnement général de l’installation, de manière à assurer une protection ultime des installations vis-à-vis des agressions.

A la demande de l’ASN, le "noyau dur" proposé par EDF a été analysé par l’IRSN et les conclusions de cette analyse ont été présentées au groupe permanent d’experts en charge des réacteurs nucléaires (GPR), les 13 et 20 décembre 2012.

A partir des recommandations formulées par le GPR, l’ASN a élaboré des projets de décisions qui établissent des prescriptions complémentaires précisant certaines exigences relatives au "noyau dur" proposé par EDF pour ses centrales nucléaires. Du 18 novembre au 9 décembre 2013, le public a été invité à consulter les projets de décisions de l’ASN relatives aux prescriptions complémentaires applicables à EDF pour le "noyau dur" des centrales nucléaires, et à faire part de ses observations sur le contenu de ces projets.

Ces décisions seront applicables à l’ensemble des centrales nucléaires en fonctionnement, ainsi qu’au réacteur EPR de Flamanville 3 en cours de construction.

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L’ASN rappelle les autres mesures relatives aux centrales nucléaires EDF décidées à la suite des Évaluations complémentaires de sûreté (ECS).

A l’issue des ECS, dans son avis du 3 janvier 2012, l’ASN soulignait qu’elle allait imposer aux exploitants un ensemble de dispositions et renforcer les exigences de sûreté relatives à la prévention des risques naturels (séisme et inondation), à la prévention des risques liés aux autres activités industrielles, à la surveillance des sous-traitants et au traitement des non-conformités. Ces dispositions ont été imposées par 32 décisions de l’ASN fixant chacune une trentaine de prescriptions complémentaires relatives aux centrales nucléaires d’EDF, aux installations d’AREVA et à certains réacteurs du CEA. Les mesures correspondantes doivent conduire à un renforcement significatif des marges de sûreté au-delà du dimensionnement des installations.

Outre le "noyau dur", ces prescriptions imposent à EDF :

  • la « Force d’action rapide nucléaire » (FARN), dont l’ASN s’est assurée qu’elle est en mesure d’intervenir depuis fin 2012 et qui devra être complètement opérationnelle au plus tard fin 2014. Cette force permet d’apporter un secours à un site accidenté en fournissant des équipes spécialisées pouvant suppléer celles de la centrale concernée et du matériel mobile assurant des appoints en eau et électricité. Dans ce cadre, plusieurs modifications ont été mises en place sur les réacteurs afin de faciliter la connexion de ce matériel apporté par la FARN ;
  • en l’attente du déploiement des 58 groupes électrogènes diesel d’ultime secours sur chaque réacteur, des groupes électrogènes de moyenne puissance ont été ajoutés sur chaque réacteur avant le 30 juin 2013 ;
  • des formations renforcées de ses agents pour intervenir en cas de séismes et en cas d’accident grave.

Le tableau jointdétaille l’avancement de chacune des mesures imposées par les prescriptions fixées à EDF dans les décisions du 26 juin 2012.

Dans son avis du 3 janvier 2012, l’ASN rappelait également que les facteurs sociaux, organisationnels et humains sont un élément essentiel de la sûreté. Outre les exigences dans ce domaine imposées dans les décisions de l’ASN du 26 juin 2012 (amélioration et renforcement de la formation des opérateurs, prise en compte des conditions d’intervention en situation d’urgence, prise en compte de la charge psychologique pour les agents intervenants dans ces situations, etc.), l’ASN a mis en place un groupe de travail pluraliste sur ces sujets, le Comité d’orientation sur les facteurs sociaux, organisationnels et humains (COFSOH). Deux réunions plénières de ce comité ont permis, en 2013, de dresser un état des lieux de travaux engagés par trois groupes de travail sur les thèmes suivants :

  • la sous-traitance en situation de fonctionnement normal : organisations et conditions d’intervention ;
  • le recours à la sous-traitance : questions juridiques ;
  • la gestion des situations de crise.

En outre, l’ASN recommandait dans son avis que le projet d’arrêté fixant les règles générales relatives aux installations nucléaires de base, qu’elle avait préparé en relation avec les ministères chargés de la sûreté nucléaire, soit signé au plus vite. Cet arrêté a été signé le 7 février 2012 et il apportera une contribution importante à l’amélioration de la sûreté ; il impose notamment des exigences nouvelles concernant :

  • la surveillance des intervenants extérieurs par les exploitants nucléaires ;
  • la prise en compte de cumuls de situations pour démontrer la sûreté nucléaire ;
  • la détection et le traitement des écarts ;
  • l’encadrement des capacités techniques des exploitants et de leurs modifications ;
  • la compétence et la qualification des personnes réalisant des activités susceptibles d’engendrer des risques ;
  • le développement d’une politique, qui doit également être mise en œuvre par les prestataires, affirmant la priorité accordée à la prévention des risques engendrés par l’installation.

En 2013, l’ASN s’est attachée à vérifier la bonne application des dispositions de cet arrêté. L’ASN précisera certaines des exigences de cet arrêté dans des décisions réglementaires (la première a été publiée en 2013 et plusieurs autres le seront en 2014).

Enfin, sur la base du retour d’expérience approfondi de l’accident de Fukushima,l’ASN annonçait dans son avis du 3 janvier 2012 qu’elle renforcerait les référentiels de sûreté des installations nucléaires.Dans ce cadre, l’ASN a publié en 2013 son guide n°13 « relatif à la protection des installations nucléaires de base contre les inondations externes », qui détaille les recommandations visant à évaluer et à quantifier les risques d'inondation externe de ces installations, et à définir les moyens de protection adaptés pour y faire face.

En 2014, l’ASN prévoit de finaliser un guide d’application des nouvelles dispositions introduites par l’arrêté du 7 février 2012 concernant le traitement des écarts affectant les centrales nucléaires, afin d’encadrer explicitement les délais de remise en conformité des installations à la suite de la découverte d’une anomalie.

Pour ce qui concerne le référentiel de sûreté concernant la prise en compte des risques liés au séisme, les prescriptions fixant les exigences complémentaires pour la mise en place du "noyau dur" viennent renforcer notablement la résistance des centrales nucléaires vis-à-vis de ce risque. Enfin, l’ASN a engagé, en lien avec l’IRSN, une réflexion sur la mise à jour des référentiels de sûreté applicables aux autres agressions externes.

En savoir plus :

Consulter la synthèse des contributions reçues lors de la consultation du public

 

Date de la dernière mise à jour : 02/03/2023