Livre blanc du Tritium & bilan des rejets de tritium pour les INB

251 Les effets biologiques et sanitaires du tritium : questions d’actualité 1 Introduction Sous l’effet d’évènements collectifs aux conséquences délétères avérées ou potentielles, et dans le contexte d’une société à plusieurs titres vulnérable, les notions de risque technologique et de prévention ont émergé comme des objets sociaux et politiques majeurs. Dans ce contexte, l’augmentation prévisible des rejets en tritium par l’industrie nucléaire civile suscite des interrogations et une demande pressante d’information, au niveau notamment de leur impact sanitaire. Pour essayer de répondre à cette demande, il convient d’interroger les données relatives à l’impact biologique et sanitaire du tritium et de faire apparaître l’ensemble des questions qui sont susceptibles de se poser à son sujet. Nous évoquerons dans un premier temps les concepts, données et connaissances qui fondent aujourd’hui la radioprotection et singulièrement la radioprotection du tritium, et dans un second temps nous en souligneront les limites. Les effets sanitaires d’une exposition aux rayonnements ionisants sont classés selon trois critères : lemoment de leur apparition (effets précoces/ tardifs), la cible du dommage (le sujet irradié/sa descendance) et leur caractère aléatoire ou déterministe1. Les effets considérés aujourd’hui comme aléatoires sont les cancers et les effets héréditaires, les autres types d’effets étant considérés comme déterministes. Ils sont censés apparaître après des expositions dont le niveau est inférieur aux niveaux d’apparition des effets déterministes, le principe étant retenu d’une relation linéaire sans seuil. Outre la définition d’une limite de dose efficace engagée, la radioprotection individuelle reposera donc d’une part sur l’évaluation d’une relation dose efficace engagée / effets aléatoires, et d’autre part sur la définition de coefficients de dose efficace engagée (pour la contamination interne, de doses par unités d’incorporation = DPUI). Les effets étudiés sont les effets cliniques, mais également les effets biologiques précoces subis par le noyau ou par d’autres constituants de la cellule (membrane…) et qui, par-delà la mort cellulaire, peuvent être à l’origine d’effets cliniques notamment aléatoires (cancers, effets héréditaires). Quatre types d’approche sont susceptibles d’être mis en œuvre pour identifier et quantifier ces effets. Quelles sont les données et connaissances disponibles concernant une contamination par le tritium ? 2 Les données disponibles concernant la relation dose-effet et la définition des DPUI du tritium 2 1 Les données disponibles en épidémiologie humaine et en expérimentation animale Plusieurs études épidémiologiques, qui portent essentiellement sur les travailleurs et plus rarement sur les populations riveraines d’installations nucléaires (donc exposés de manière chronique à de faibles doses et de faibles débits de dose de tritium) font apparaître une sur incidence ou une surmortalité de/par différents types de cancers (prostate, rectum, voies urinaires, leucémies). Mais elles présentent pour la plupart des biais méthodologiques importants (absence de dosimétrie tritium, expositionsmultiples, puissance statistique de l’étude, effet du travailleur sain…) qui ne permettent pas d’imputer ces observations à l’exposition au tritium. Néanmoins, l’excès de risque relatif de cancer ou de leucémie est selon Zablotskaet al. (2004) plus élevé lorsque la dosimétrie prise en compte intègre la dosimétrie tritium que lorsque tel n’est pas le cas. De même, les décès par leucémie seraient plus nombreux chez les enfants de la ville canadienne de Pickering après la mise en service du réacteur du même nom (AECB, 1991a). Les études expérimentales conduites sur l’animal sont mieux documentées. Elles ont mis en évidence une sur incidence et/ou la Les effets biologiques et sanitaires du tritium : questions d’actualité S. Gazal 1, C. Chenal 2, J.C. Amiard 3 - Membres du Comité Scientifique de l’Association Nationale des comités et commissions locales d’information (ANCCLI) 1 UMR CNRS 5263, CLLE, Laboratoire Travail et Cognition, Université de Toulouse 2. 2 UMR CNRS 6553, ECOBIO, Equipe Radiations, Environnement, Adaptation, Université de Rennes 1. 3 EA2160, MMS, Service d’Ecotoxicologie, Université de Nantes. 1 Les effets aléatoires sont caractérisés par le fait que leur probabilité augmente avec la dose reçue, mais non leur gravité, qu’ils apparaissent chez certains sujets irradiés mais non chez tous et que ce sont des effets sans seuil. Les effets déterministes apparaissent chez tous les sujets irradiés à partir d’un certain seuil et leur gravité augmente avec la dose reçue. 5 CHAPITRE

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