Livre blanc du Tritium & bilan des rejets de tritium pour les INB

231 Point de vue de l’IRSN sur les questions clés et sur les pistes de recherche et de développement • la libération de tritium lors des essais aériens d’armes nucléaires effectués entre 1945 et 1980, représentant une quantité de tritium estimée à 186.1018 Bq ; • les rejets des installations du cycle du combustible nucléaire civiles et militaires en fonctionnement normal et lors des phases de démantèlement, représentant globalement une activité annuelle de 9,83 1015 Bq (année 2008), à 94% dans les effluents liquide (figure 1) ; • les rejets liés à l’utilisation du tritium dans l’industrie biomédicale, et plus généralement aux activités de recherches (molécules marquées) ; • l’utilisation ancienne du tritium dans l’horlogerie et la fabrication de peintures luminescentes. La quantité de tritium présente dans la biosphère a fortement augmenté lors des essais d’armes nucléaires dans l’atmosphère, entre 1945 et 1980. La décroissance radioactive (période de 12,32 ans) a fait disparaître près de 90 % du tritium produit au cours de cette période. Aujourd’hui et pour les années à venir, les sources de tritium les plus importantes sont celles issues des rejets des installations du cycle du combustible nucléaire (réacteurs, usines de traitement de combustibles usés) et, dans le futur, des applications impliquant la fusion nucléaire. L’IRSN dispose, sur plusieurs décennies, de nombreux résultats de mesure du tritium dans des échantillons terrestres, aquatiques et marins prélevés soit dans le cadre de sa mission de surveillance de l’environnement, soit dans le cadre d’études radioécologiques réalisées sur le territoire métropolitain français, autour des diverses installations nucléaires (centrales nucléaires en fonctionnement ou en démantèlement, usines de traitement de combustibles usés, centres de stockage…) ou sur des zones hors de toute influence industrielle afin de déterminer les bruits de fond pour les différents radionucléides. L’exploitation de ces résultats permet d’en tirer les principales informations suivantes. 2 3 1 Le tritium dans l’air Globalement, l’activité volumique du tritiumdans l’air a fortement diminué au fil des années, depuis l’arrêt des essais atmosphériques d’armes nucléaires. En 2008, les activités du tritiummesurées dans l’eau de pluie se situent entre 1 et 4 Bq/L, ce qui correspond à environ 0,01 à 0,04 Bq/m3 d’air, en supposant un équilibre entre l’eau de pluie et la vapeur d’eau de l’air ambiant. Des valeurs significativement plus élevées sont observées auprès des sites nucléaires de Valduc (d’un facteur 100 à 500), Marcoule et La Hague. En revanche, un tel marquage de l’air n’est pas visible autour des centrales nucléaires qui rejettent beaucoup moins de tritium dans l’air. Par ailleurs, il semble que les activités du tritium atmosphérique sous forme de HT et de CH 3 T demeurent à des niveaux stables, respectivement de 0,019 et 0,012 Bq/m3, supérieurs au bruit de fond antérieur à 1945. Les activités actuelles de ces formes du tritium suggèrent que leur transformation en HTO est très lente ou qu’un apport significatif de tritium sous forme HT et CH 3 T se poursuit encore actuellement. 2 3 2 Le tritium dans les écosystèmes terrestres L’examen des résultats acquis par l’IRSN au cours des 20 dernières années, principalement pour des échantillons végétaux, montre une gamme de valeurs d’activité volumique allant de moins de 1 Bq/L à près de 50 Bq/L dans les zones hors influence des rejets d’installations nucléaires, et pouvant parfois dépasser une centaine de Bq/L dans des échantillons prélevés sous l’influence des rejets atmosphériques d’installations. D’autres données de la littérature technique indiquent des valeurs de plusieurs milliers de Bq/L pour certains végétaux sous l’influence de rejets. Les gammes de valeurs sont analogues pour le tritium libre et pour le tritium lié à la matière organique. Ces résultats montrent globalement une tendance à la diminution depuis une quinzaine d’années, souvent selon une période plus courte (environ 6 ans pour le lait) que la période radioactive du tritium (pour plus de détail, voir le paragraphe 3.2.3). Aujourd’hui, la quantification, enmilieu continental, des activités de tritium imputables aux installations nucléaires devient délicate car les valeurs à mesurer sont proches du bruit de fond local. 2 3 3 Le tritium dans les écosystèmes aquatiques continentaux Les résultats de mesures de l’IRSN des 20 dernières années montrent une gamme de valeurs d’activité et une évolution similaires à celles observées en milieu terrestre, pour les échantillons végétaux et animaux. Dans les eaux de surface, les valeurs d’activité du tritium ont varié dans une gamme de 1 à quelques milliers de Bq/L à l’aval des points de rejet d’effluents liquides des installations nucléaires, alors qu’aujourd’hui, cette activité mesurée dépasse rarement 100 Bq/L. 2 3 4 Le tritium dans le milieu marin La concentration du tritium dans les eaux océaniques de surface devait être d’environ 0,1 Bq/L avant 1945. Elle a été plus que doublée du fait des retombées des essais nucléaires atmosphériques. Les apports industriels, en particulier ceux des usines de traitement de combustiblesusés(LaHagueenFranceetSellafieldenGrande-Bretagne), sont actuellement les principales sources de tritiumpour les écosystèmes marins. A proximité de l’émissaire de rejet de l’usine de la Hague, qui est la principale source de tritiumpour la Manche, la concentrationmoyenne du tritiummesurée dans l’eau de mer à la côte est d’environ 10 Bq.L-1. Parmi les 14 000 mesures effectuées en mer par l’IRSN, dans le « panache » des rejets de l’usine, la concentration mesurée la plus élevée a été de 3600 Bq.L-1  ; elle correspond à un rejet effectué une heure plus tôt. Les mesures de surveillance de routine ne permettent pas de déceler les contributions des autres installations nucléaires qui rejettent du tritium dans la Manche ; en effet, la mise en évidence de l’influence des rejets de tritium des centrales nucléaires côtières (Flamanville, Paluel, Penly et Gravelines) nécessiterait la mesure d’activités volumiques inférieures à 1 Bq/L, ce qui n’est pas possible avec la technique usuelle de mesure par scintillation (cf. 2.2.1). L’activité du tritiummesurée dans des organismesmarins (mollusques, poissons, crustacés) et des végétaux (algues) prélevés au voisinage de l’usine AREVA de la Hague varie entre environ 5 et 15 Bq/L, aussi bien pour le tritium libre (HTO) que pour le tritium lié à la matière organique (OBT ; voir aussi § 3). En conclusion, l’IRSN considère que les nombreuses mesures réalisées dans l’environnement, principalement au voisinage des installations nucléaires, apportent une bonne connaissance des gammes de valeurs d’activité du tritium dans les différents milieux et montrent des évolutions globalement à la baisse au cours des 20 dernières années. Aujourd’hui, pour poursuivre l’observation de ces évolutions, il est nécessaire de recourir à des techniques de mesure permettant d’atteindre une limite de détection de l’ordre de 1 Bq/L, voire inférieure. C’est pourquoi l’IRSN est en train de se doter d’un équipement de mesure du tritium par l’hélium-3, répondant à cet objectif.

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