de l’environnement en situation accidentelle. Les objectifs de sûreté à atteindre doivent être adaptés, en cohérence avec les modalités de prise en compte des agressions malveillantes, pour envisager une implantation de réacteurs sur de tels sites. L’ASN a mis en place un cadre pluraliste d’échanges associant des parties prenantes pour éclairer sa réflexion et pouvoir ainsi se positionner sur les objectifs de sûreté de ces réacteurs. Par ailleurs, les réacteurs les plus innovants ont besoin de combustibles spécifiques pour lesquels les chaînes industrielles de production et de retraitement n’existent pas encore et nécessiteraient des investissements conséquents. L’ASN rappelle l’importance de développer une approche systémique intégrant la chaîne industrielle, la fourniture du combustible nucléaire, la gestion des combustibles usés et autres déchets générés, ainsi que la gestion des risques de malveillance et de prolifération des matières nucléaires. Confrontée à un défi de qualité et de culture de sûreté dans la chaîne de sous‑traitance, la filière industrielle a lancé de nombreuses initiatives La relance de l’industrie nucléaire représente un défi pour la filière pour répondre, outre les enjeux de recrutement, à une croissance inégalée depuis plusieurs décennies et garantir la qualité attendue de tous les composants participant à la sûreté. La rigueur industrielle et la culture de sûreté sont impératives et la filière, en particulier au sein du Groupement des industries françaises de l’énergie nucléaire (GIFEN), en a pleinement conscience. Néanmoins, l’année 2024 a encore été l’occasion de découvertes d’écarts voire d’irrégularités significatifs, qui ont fait l’objet d’un traitement par les exploitants concernés et d’une instruction des services de l’ASN. Face à cette persistance d’écarts, le collège a auditionné le président‑directeur général d’EDF pour s’assurer d’une réelle mobilisation collective pour éviter la reproduction, notamment sur les chantiers du nouveau nucléaire, des défauts de fabrication et de construction qui ont émaillé le chantier de l’EPR de Flamanville. L’ASN estime que les plans proposés par EDF et le GIFEN vont dans le bon sens mais constate que la mobilisation des acteurs du tissu industriel reste encore fragile. L’ASN a produit en 2024 un guide pratique dédié à la qualité des matériels destinés aux installations nucléaires, qui rappelle notamment l’importance de l’identification, au juste besoin, des exigences et la nécessité de mettre en place une surveillance appropriée au bon moment de la chaîne de production. Réflexions sur l’évolution de long terme des usines du « cycle du combustible » Depuis plusieurs années, l’ASN alerte sur les tensions qui pèsent sur le « cycle du combustible » en France. Les installations du « cycle » présentent des fragilités et chaque atelier est un maillon unique dans une chaîne de traitement. Une saturation des entreposages de combustibles usés à La Hague aurait également des conséquences sur le fonctionnement des centrales nucléaires. La baisse importante de la production de l’usine Melox et la corrosion plus rapide que prévu des évaporateurs de La Hague, utilisés pour la concentration des solutions nitriques de produits de fission et transuraniens, ont illustré, ces dernières années, cette fragilité. Cette situation est, toutefois, en voie d’amélioration avec la hausse progressive de la production de Melox depuis deux ans et le remplacement des évaporateurs à La Hague achevé cette année. En ce qui concerne la tension sur le « cycle », la décision de poursuivre le fonctionnement des réacteurs consommateurs de combustible MOX, ceux de 900 MWe, éloigne la perspective de saturation des entreposages de combustibles usés. À la suite du Conseil de politique nucléaire de février 2024, une réflexion active a été engagée sur la pérennisation et le renouvellement des usines du « cycle », dans la perspective de la poursuite de la politique de retraitement jusqu’à la fin de ce siècle. Dans ce contexte, EDF a renoncé à son projet de piscine centralisée au profit d’une installation intégrée au programme industriel d’Orano sur le site de La Hague. Les nouvelles installations devront être conçues en tenant compte des standards de sûreté les plus récents, au moins équivalents à ceux du projet de piscine centralisée d’EDF. Dans l’attente de ces futures installations et compte tenu du fait qu’elles ne prendront pas instantanément le relais des installations actuelles, il est indispensable de poursuivre la mise en place des parades au risque de saturation. Au‑delà des annonces, il est indispensable que des décisions soient prises dès à présent afin que les projets passent à une phase de réalisation et aboutissent dans les délais les plus brefs possibles, à commencer par la mise en service des nouvelles piscines en 2040. Ainsi, les étapes importantes à venir sont la remise par Orano de dossiers d’options de sûreté (DOS) pour les installations nouvelles puis la saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) sur un dossier de présentation des projets de nouveaux bassins d’entreposage de combustibles usés. Il est souhaitable que le projet Aval du futur fasse également l’objet, à l’issue de la phase actuelle d’études, d’un débat et de concertations. Éditorial du collège Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2024 5
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