RAPPORT DE L’ASN 2024

C’est pourquoi le décret prescrivant le démantèlement peut prévoir qu’un certain nombre d’étapes feront l’objet, le moment venu, d’un accord préalable de l’ASN, sur la base de dossiers de sûreté spécifiques établis au plus près des opérations à réali‑ ser et tenant compte des meilleures tech‑ niques alors disponibles, et dans le respect des objectifs fixés par le décret de déman‑ tèlement (notamment en matière d’état final et de niveau d’assainissement visé). Le schéma « Phases de vie d’une instal‑ lation nucléaire de base » (voir pages 362 et 363) décrit la procédure réglementaire associée. La phase de démantèlement peut être précédée d’une étape de préparation au démantèlement, réalisée sous le couvert de l’autorisation d’exploitation initiale. Cette phase préparatoire permet par exemple d’évacuer une partie des substances radio- actives et chimiques, notamment le com‑ bustible usé, pour le cas d’un réacteur nucléaire, ainsi que de préparer des opéra‑ tions de démantèlement (aménagement de locaux, préparation de chantiers, formation des équipes, etc.). C’est également lors de cette phase préparatoire que peuvent être réalisées certaines opérations de carac‑ térisation de l’installation (cartographies radiologiques, analyse de l’historique de l’exploitation) indispensables pour éta‑ blir les scénarios d’assainissement visés. Le code de l’environnement prévoit que la sûreté d’une installation en phase de démantèlement, comme celle de toutes les autres INB, soit réexaminée périodique‑ ment, au moins tous les 10 ans. L’objectif de l’ASN est de s’assurer, par ces réexamens périodiques, que l’installation res‑ pecte les dispositions de son décret de démantèlement et les exigences de sûreté et de radioprotection associées jusqu’à son déclassement, en appliquant les principes de la défense en profondeur propres à la sûreté nucléaire, dans une logique proportionnée aux enjeux. En effet, si les opérations de démantèle‑ ment entraînent l’affaiblissement, voire la disparition des barrières physiques exis‑ tantes, l’exploitant doit, en fonction des enjeux de sûreté et de radioprotection résiduels, maintenir des lignes de défense adaptées nécessaires à la protection des travailleurs et de l’environnement (mise en place de sas, ventilation nucléaire, balises de radioprotection, etc.). À l’issue de son démantèlement, une INB doit être déclassée, sur décision de l’ASN homologuée par le ministre chargé de la sûreté nucléaire. Elle est alors retirée de la liste des INB et ne relève plus du régime correspondant. Une vingtaine d’installa‑ tions, majoritairement d’anciens réacteurs de recherche, ont à ce jour été démante‑ lées et déclassées. Au 31 décembre 2024, l’ASN instruit 23 dossiers de démantèlement d’instal‑ lations définitivement arrêtées, dont le démantèlement n’a pas été encore pres‑ crit ou dont les conditions de démantè‑ lement sont substantiellement modifiées. 1.4 Le financement du démantèlement et de la gestion des déchets radioactifs Le code de l’environnement, dans ses articles L. 594‑1 à L. 594‑10 et D. 594‑1 à D. 594‑18, définit le dispositif relatif à la sécurisation des charges nucléaires liées au démantèlement des installations nucléaires, à la gestion des combustibles usés et à la gestion des déchets radio- actifs. Ce dispositif est précisé par l’arrêté du 21 mars 2007 relatif à la sécurisation du financement des charges nucléaires. Cet arrêté vise à sécuriser le financement des charges nucléaires, dans la logique du principe « pollueur‑payeur ». Les exploi‑ tants nucléaires doivent ainsi prendre en charge ce financement, par la constitution d’un portefeuille d’actifs dédiés, à hauteur des charges anticipées. Ces charges doivent être évaluées de manière prudente, en prenant en compte les diffé‑ rentes incertitudes. Les exploitants sont ainsi tenus de remettre au Gouvernement des rapports triennaux relatifs à ces charges et des notes d’actualisation annuelles. Le provisionnement se fait sous le contrôle direct de l’État, qui analyse la situation des exploitants et peut prescrire les mesures nécessaires en cas d’insuffisance ou d’ina‑ déquation. La Direction générale du trésor et la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) constituent l’autorité admi‑ nistrative compétente pour ce contrôle. La DGEC saisit l’ASN afin de rendre un avis technique sur les hypothèses prises par les exploitants. Dans tous les cas, ce sont les exploitants nucléaires qui restent responsables du bon financement de leurs charges de long terme. 2 La situation des installations nucléaires en démantèlement : enjeux spécifiques À la fin de l’année 2024, 36 installations sont définitivement arrêtées ou en cours de démantèlement en France, soit envi‑ ron un quart des INB (voir carte page 368). Ces installations sont très variées (réac‑ teurs électronucléaires, réacteurs de recherche, installations du « cycle du combustible », installations support, etc.) et les enjeux du démantèlement diffèrent d’une installation à l’autre. Ces enjeux sont cependant tous liés à la quantité importante de déchets à gérer pendant le démantèlement et aux conditions d’in‑ tervention au plus près de zones conta‑ minées ou activées. Les enjeux de sûreté et de radioprotection sont d’autant plus élevés que les installations contiennent des déchets historiques ; c’est le cas, en parti‑ culier, des anciennes usines de traitement de combustibles irradiés d’Orano ou des anciennes installations d’entreposage du CEA. L’une des problématiques majeures du démantèlement est la mémoire de la conception et de l’exploitation de l’instal‑ lation. Ainsi, le maintien de compétences et la phase de caractérisation de l’installa‑ tion visant à définir son état initial (état de l’installation au début du démantèlement) présentent une importance cruciale. 2.1 Les réacteurs électronucléaires 2.1.1 Les réacteurs électronucléaires à eau sous pression Le démantèlement des REP bénéficie d’un retour d’expérience acquis sur de nombreux projets à l’international, et la conception de ces réacteurs facilite leur démantèlement par rapport à d’autres tech‑ nologies de réacteur. Le démantèlement de ce type d’installation ne présente ainsi pas d’enjeu technique majeur et sa faisabilité est acquise. Toutefois, quelle que soit la durée de vie des réacteurs en fonctionne‑ ment, EDF sera confrontée au démantè‑ lement simultané de plusieurs REP. EDF devra donc s’organiser pour industriali‑ ser le démantèlement afin de respecter l’obligation de démantèlement de chaque installation dans un délai aussi court que possible. Le premier chantier de démantèlement des REP en France est celui du réacteur Chooz A (INB 163). Il s’agit d’un modèle réduit par rapport aux réacteurs électro‑ nucléaires en fonctionnement. Il présente quelques difficultés techniques particu‑ lières liées à sa construction dans une caverne ; certaines opérations sont plus complexes, telle l’extraction de gros com‑ posants comme les générateurs de vapeur. Le démantèlement de la cuve de Chooz A est en cours depuis 2014 et se poursuit dans des conditions satisfaisantes. Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2024 365 01 03 04 09 11 12 13 15 AN Le démantèlement des installations nucléaires de base 05 06 02 08 10 07 14

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