RAPPORT DE L’ASN 2024

Les appréciations de l’ASN par domaine d’activité LE DOMAINE MÉDICAL L’ASN considère, sur la base des inspections conduites en 2024 et d’une analyse faite sur la période permettant de couvrir l’ensemble du parc des installations à enjeux, que l’état de la radioprotection dans le domaine médical se maintient à un niveau satisfaisant, relativement comparable d’une année sur l’autre, avec toutefois des fragilités persistantes. L’ASN relève que les démarches d’expé‑ rimentation des audits cliniques qui ont été lancées fin 2023, uniquement en radio‑ thérapie et radiologie sous le pilotage du ministère chargé de la santé, se déploient de manière satisfaisante, mais nécessitent d’être poursuivies avant d’être généralisées. Elle encourage leur extension aux activités les plus à risque, prioritairement la radio‑ chirurgie, ainsi que la médecine nucléaire à visée thérapeutique, et appelle les conseils nationaux professionnels (CNP) à, d’ores et déjà, se mobiliser pour construire les grilles d’audit. En outre, elle encourage également les services de radiothérapie à s’inscrire dans des démarches d’évalua‑ tion des nouvelles pratiques à l’instar de celle mise en place pour la radiothérapie adaptative. Elle encourage les CNP à prendre en compte les besoins d’évolution des guides de formation à la radioprotection qu’ils ont élaborés, en se fondant sur les résultats de l’évaluation du nouveau dispositif de for‑ mation à la radioprotection des patients que l’ASN a publiée en 2024. L’ASN attire l’attention sur le fait que les signaux identifiés en 2023, rappelés ci‑après, conduisent à dégrader la culture de radioprotection. Ils sont identifiés comme facteur contributif dans la surve‑ nue d’ESR et relevés en inspection comme des éléments explicatifs d’une moins bonne conformité réglementaire : ∙un constat généralisé de ressources amoindries avec des tensions dans les effectifs de manipulateurs en électrora‑ diologie médicale (MERM), praticiens médicaux, physiciens médicaux avec le développement de l’intérim et des glissements de tâches ; ∙le recours, en imagerie, à des prestations insuffisamment maîtrisées pour assister les personnes compétentes en radioprotec‑ tion (PCR) et les physiciens médicaux des établissements, susceptible de conduire à une perte de compétence en radioprotec‑ tion et à un manque de flexibilité pour mettre en œuvre les exigences réglemen‑ taires de radioprotection (formation, véri‑ fications, etc.) ; ∙une progression constante de la téléra‑ diologie avec des contraintes techniques et organisationnelles liées à ce mode d’organisation sous‑estimées par les éta‑ blissements (problème de communication, interface des logiciels) ; l’ASNR publiera en 2025 les enseignements issus d’une étude qu’elle a conduite sur ce sujet ; ∙la complexification des organisations, avec des mutualisations de moyens et le risque de dilution des responsabilités, dans un contexte de réformes des autorisations de soins et de rachats de centres. Aussi, l’ASN maintient sa demande de vigi‑ lance auprès des décideurs, sur la nécessité d’évaluer l’impact de ces évolutions sur les organisations et le travail des interve‑ nants et de définir précisément les rôles et responsabilités de l’ensemble des acteurs afin que les exigences de radioprotection soient respectées. En radiothérapie, si les fondamentaux de la sécurité sont en place, les services de radiothérapie peinent à dynamiser les démarches de retour d’expérience avec des réunions de comités de retour d’expérience moins nombreuses, des analyses d’ESR insuffisamment approfondies et des dif‑ ficultés persistantes pour évaluer la robus‑ tesse des actions correctives. La répétition d’erreurs de cibles (en particulier erreurs de latéralité, de délinéation ou de position‑ nement), la multiplication des traitements simultanés de plusieurs localisations ainsi que des ré‑irradiations, dans un contexte où de plus en plus de patients bénéficie‑ ront de plusieurs radiothérapies au cours de leur vie, soulignent la nécessité, d’une part, d’évaluer régulièrement les barrières mises en place en tirant davantage partie du retour d’expérience dressé au niveau national ; d’autre part, d’actualiser les ana‑ lyses de risque a priori sur la base du retour d’expérience local et national. Ces études sont encore incomplètement déployées en amont des changements techniques et organisationnels. En curiethérapie, les inspections confir‑ ment une bonne prise en compte des règles de radioprotection. Les enjeux liés au maintien des ressources et compétences nécessaires à cette activité demeurent dans les années à venir. Les nouvelles exigences relatives à la protection des sources de haute activité contre la malveillance conti‑ nuent de se déployer progressivement, en particulier s’agissant de la mise en place d’une politique de protection, des mesures permettant d’empêcher l’accès non auto‑ risé à ces sources et de l’identification et la maîtrise des informations sensibles. La situation s’améliore progressivement sans encore pouvoir être considérée comme conforme. En médecine nucléaire, les inspections témoignent d’une prise en compte satis‑ faisante de la radioprotection des patients s’agissant de la mise en œuvre du principe d’optimisation avec le recueil et l’analyse des niveaux de référence diagnostique (NRD), tout en soulignant que le déploie‑ ment des systèmes de management de la qualité (SMQ) doit encore progresser. Les ESR révèlent que les processus d’adminis‑ tration doivent être régulièrement éva‑ lués afin d’assurer la maîtrise du circuit du médicament, en particulier ceux pou‑ vant conduire à des erreurs concernant plusieurs patients (utilisation de l’activi‑ mètre). L’ASN attire l’attention des respon‑ sables d’activités nucléaires (RAN) sur le risque d’extravasation avec les traitements au lutétium-177, qui peut conduire à des expositions significatives au site d’injec‑ tion, et travaille actuellement, en collabora‑ tion avec les professionnels, à l’élaboration d’un retour d’expérience des ESR déclarés. Elle a, par ailleurs, mis à disposition une fiche «retour d’expérience» concernant des complications intervenues lors d’un trai‑ tement d’un cancer hépatique par radio- embolisation utilisant l’yttrium-90. En outre, une attention particulière doit être portée à la gestion des effluents (fonction‑ nement des alarmes des cuves de décrois‑ sance) et des déchets générés par les patients, liés à l’émergence de nouveaux radiopharmaceutiques. Enfin, malgré des progrès concernant la formation des pro‑ fessionnels, une situation moins satisfai‑ sante est observée en 2024 s’agissant de la radioprotection des travailleurs et du contrôle des équipements et des sources (analyse de la dosimétrie, vérifications, coordination des mesures de prévention lors de coactivité). 28 Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2024 Les appréciations de l’ASN

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