3.1.1 Les différentes méthodes utilisées La gammagraphie Les appareils de gammagraphie contiennent le plus souvent des sources radioactives scellées de haute activité, principalement de l’iridium-192, du cobalt-60 ou du sélénium-75, dont l’acti‑ vité peut atteindre une vingtaine de téra‑ becquerels. Un appareil de gammagraphie est le plus souvent un appareil mobile pou‑ vant être déplacé d’un chantier à l’autre. Il se compose principalement de : ∙un projecteur de source, servant de conteneur de stockage et assurant une protection radiologique quand la source n’est pas utilisée ; ∙une gaine d’éjection, destinée à permettre le déplacement de la source et à la guider jusqu’à l’objet à radiographier ; ∙une télécommande, permettant la mani‑ pulation à distance par l’opérateur. Lors de l’éjection de la source hors du projecteur, les débits de dose peuvent atteindre plusieurs grays par heure à 1 mètre de la source, en fonction du radio‑ nucléide et de son activité. Du fait de l’activité des sources et du dépla‑ cement de la source hors du conteneur de stockage pendant l’utilisation de l’ap‑ pareil, la gammagraphie peut présenter des risques importants pour les opéra‑ teurs en cas de mauvaise manipulation, de non‑respect des règles de radioprotec‑ tion ou d’incidents de fonctionnement. Par ailleurs, elle est fréquemment menée en conditions de chantier dans des cir‑ constances difficiles (travail de nuit, lieu de travail exposé aux intempéries ou exigu, etc.). À ce titre, il s’agit donc d’une activité à fort enjeu de radioprotection, qui figure parmi les priorités de contrôle de l’ASN. La radiographie industrielle par rayonnements X Les appareils de radiographie industrielle par rayonnements X sont très variés, allant d’appareils fixes (intégrés dans une instal‑ lation de taille très variable) à des appa‑ reils mobiles qui peuvent être utilisés aussi bien en conditions de chantier qu’en ins‑ tallation. En application du principe d’op‑ timisation, ils doivent se substituer aux appareils de gammagraphie, lorsque les conditions de mise en œuvre le permettent, car leur utilisation permet d’éviter la mise en œuvre d’une source radioactive. En dehors du contrôle non destructif, ces appareils peuvent aussi être utilisés pour des emplois plus spécifiques, et donc plus rares, tels que la réalisation de radiogra‑ phies en vue de la restauration d’instru‑ ments de musique ou de tableaux, l’étude de momies en archéologie ou l’analyse de fossiles. 3.1.2 L’évaluation de l’état de la radioprotection Les activités de radiographie industrielle représentent de forts enjeux et constituent depuis plusieurs années une priorité d’ins‑ pection pour l’ASN. En 2024, l’ASN a mené 149 inspections sur ce thème, de retour dans la moyenne de ces dernières années après une légère diminution lors de l’exercice 2023. Parmi ces inspections, 61 ont été réalisées de manière inopinée lors de chantiers qui se déroulent de nuit, le cas échéant. Le système de télédéclaration des plan‑ nings de chantier pour les entreprises Perte de contrôle d’une source de gammagraphie à Colmar (68) avec des conséquences à l’extérieur du site Le 10 avril 2024, lors d’une opération de radiographie industrielle en fin de journée d’une entreprise prestataire dans l’établissement de son donneur d’ordre situé à Colmar (Haut-Rhin), le contrôle de la source de gammagraphie d’iridium-192 a été perdu lors du premier tir. Le débit d’équivalent de dose ambiant important en résultant a conduit à l’intervention de la préfecture pour coordonner l’action des services mobilisés (pompiers, forces de l’ordre, sécurité civile, ASN, etc.) et à la mise en place d’une zone d’exclusion empiétant sur l’extérieur du site du donneur d’ordre et entraînant, de fait, l’évacuation des entreprises et des habitations riveraines (une décision extrêmement rare, les événements de perte de contrôle de source de gammagraphie n’ayant généralement aucun impact pour le public). Le lendemain, une intervention du fabricant de l’appareil de gammagraphie, des pompiers et de la sécurité civile a conduit à la réduction du débit d’équivalent de dose environnant, ce qui a permis de réduire considérablement la zone d’exclusion (en‑deçà des limites du site du donneur d’ordre) et de lever l’ordre d’évacuation. Lors d’une intervention ultérieure, le fabricant a pu récupérer le contrôle de la source de gammagraphie et l’évacuer. L’inspection réactive de l’ASN a mis en évidence une insuffisance de préparation et de coordination entre l’entreprise prestataire et le donneur d’ordre lors de la définition des conditions de réalisation des tirs radiographiques, qui a été décisive dans la chaîne d’événements ayant conduit à la mise en place d’une zone d’exclusion débordant sur la voie publique. Tout d’abord, la démarche d’optimisation n’a pas été assez poussée au regard de l’environnement dense du site (premier tir sans collimateur de rayonnements ionisants qui aurait pu être remplacé par plusieurs tirs avec collimateur, d’autant plus que la délimitation de la zone d’opération de ce tir sortait largement des limites du site du donneur d’ordre). Dans les faits, la zone d’opération qui a été effectivement mise en place n’était, d’une part, pas celle prévue pour le tir sans collimateur mais celle – plus réduite – pour les tirs suivants (prévus avec collimateur), et d’autre part, il n’a été procédé à aucune vérification du débit d’équivalent de dose en ses limites. Enfin, comme cela est relevé de manière régulière dans les inspections menées sur chantiers par l’ASN, le plan de prévention était incomplet, notamment au regard de la spécificité de l’intervention, avec des moyens matériels à disposition des opérateurs insuffisants, que ce soit pour la mise en œuvre des tirs ou pour la gestion d’une situation d’urgence (indisponibilité de matelas de plomb notamment). Pour plus d’informations sur l’événement, consulter la note d’information et son complément, publiés par l’ASN sur son site internet. La perte de contrôle de la source en gammagraphie La perte de contrôle de la source (« blocage de source ») est l’une des principales causes d’accidents dans le domaine de la gammagraphie. Elle peut conduire à de fortes expositions des travailleurs se trouvant à proximité, voire du public en cas de travaux en zone urbaine. Cette perte de contrôle se rencontre principalement dans deux situations : • la source radioactive reste bloquée dans la gaine d’éjection. L’origine du blocage est souvent liée à la présence de corps étrangers dans la gaine ou à une dégradation de celle‑ci ; • l’obturation à l’avant du projecteur n’est pas complète, en raison soit de la présence de corps étrangers dans le canal empêchant la rentrée complète de la source, soit de la rupture du doigt obturateur. En France, les gammagraphes répondent à des prescriptions techniques plus strictes que les standards internationaux. Toutefois, les défaillances de matériel ne peuvent pas être écartées, notamment en cas de mauvais entretien des appareils. Ces dernières années, de mauvaises manipulations ont parfois également été observées à la suite d’incidents de «blocage de sources». Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2024 269 01 03 04 07 09 10 11 12 13 14 15 AN Les sources de rayonnements ionisants et les utilisations industrielles, vétérinaires et en recherche de ces sources 05 06 02 08
RkJQdWJsaXNoZXIy NjQ0NzU=