RAPPORT DE L’ASN 2024

En outre, deux ESR classés au niveau 1 de l’échelle ASN‑SFRO concernent des cohortes de patients et sont liés à : ∙une erreur de contourage concernant 127 patients : absence de contourage au niveau de la jonction entre la moelle épi‑ nière et le tronc cérébral sur plusieurs coupes anatomiques ; ∙une erreur de positionnement ayant concerné 6 patients à la suite d’un non fonctionnement du repositionnement auto‑ matique KV de la table sur 3 accélérateurs. Comme les années précédentes, ces évé‑ nements mettent en exergue des fragilités organisationnelles au niveau : ∙de la tenue des dossiers des patients, per‑ mettant d’avoir une vision d’ensemble et un accès, au bon moment, aux données nécessaires ; plus l’erreur est commise tôt dans le processus de prise en charge (par exemple, erreur de côté), en particulier à l’étape de la consultation initiale et de l’éla‑ boration de la prescription, et moins cette information sur la latéralité est remise en question aux étapes suivantes de la prise en charge du patient ; il est donc essen‑ tiel de tester les barrières mises en place à ces étapes du processus ; ∙des étapes de validation qui sont insuffi‑ samment explicitées quant aux paramètres à vérifier (Quel contrôle ? À quelle étape du processus ? Par quel opérateur ?) ; ∙de la gestion des flux de dossiers de patients qui, si elle n’est pas optimisée, crée des contraintes sur l’activité des professionnels favorisant la fragilisation de certaines barrières de contrôle. En outre, la multiplication des traitements complexes avec plusieurs localisations à traiter ainsi que des situations d’antécé‑ dents de radiothérapie doit conduire les centres à s’interroger sur la robustesse des barrières de sécurité pour ces situations. Par ailleurs, le GT sur le retour d’expé‑ rience des professionnels de la radio‑ thérapie animé par l’ASN a travaillé à l’élaboration de nouvelles fiches intitu‑ lées « sécurisation des traitements ». Les deux premières fiches détaillant les bonnes pratiques à mettre en œuvre pour éviter les ESR d’identitovigilance et de latéralité seront publiées au premier trimestre 2025. La baisse du nombre d’ESR se poursuit de façon importante depuis 2015 dans le domaine de la radiothérapie (voir point 2.7, graphique 14 page 246), de l’ordre de 13 % depuis 2021. Si elle est pour partie attri‑ buable à une meilleure maîtrise des risques (mise sous assurance de la qualité, déma‑ térialisation complète avec utilisation des listes de tâches des « record and verify », harmonisation des protocoles médicaux, logiciel d’aide au contourage, application automatique des décalages de dosimétrie, suivi des délais de préparation, etc.), les inspecteurs de l’ASN constatent, comme en 2023, une diminution du nombre d’évé‑ nements indésirables enregistrés et analy‑ sés en interne et des réunions de comités de retour d’expérience moins nombreuses. Enfin, les causes profondes de ces événe‑ ments sont encore insuffisamment investi‑ guées et les enseignements issus du retour d’expérience des événements déclarés au niveau national peu pris en compte. Enfin, l’ASN a mené en 2024, à l’issue du séminaire national organisé en 2023 intitulé « Démarche qualité‑sécurité en radiothérapie : quels enseignements après plus de 15 ans de mise en œuvre ? », une réflexion pour faire évoluer son contrôle. Elle a été amenée dans ce cadre à audi‑ tionner l’ensemble des parties prenantes (sociétés savantes, autorités du domaine de la santé) ainsi que d’autres autorités de contrôle et à tirer les enseignements d’un séminaire sur les pratiques d’ins‑ pections en radiothérapie organisé par HERCA (Heads of the European Radiological Protection Competent Authorities). Les nou‑ velles orientations d’inspection de l’ASNR seront communiquées début 2025 à l’en‑ semble des acteurs de la radiothérapie. Événement significatif de radioprotection de niveau 4 sur l’échelle ASN-SFRO L’ASN a été informée le 20 juin 2024 d’un ESR survenu lors du traitement d’un patient par radiothérapie externe sur récidive d’un cancer de la zone pelvienne. Le traitement, délivré dans le courant de l’été 2023, n’a pas tenu compte d’un précédent traitement par radiothérapie externe réalisé en 2013 sur la même région anatomique. Un traitement complet (soit 38 séances de 2 grays – Gy) a ainsi été dispensé en 2023, entraînant, compte tenu de la première radiothérapie, une surirradiation des organes à risque. La survenue de lésions majeures nécessitant une prise en charge chirurgicale, plusieurs mois après la fin du traitement, a permis d’identifier la surirradiation. Cet ESR a été classé au niveau 4 de l’échelle ASN-SFRO compte tenu de l’apparition chez le patient d’effets tardifs graves, avec altération majeure de la qualité de vie. Un avis d’incident a été publié le 12 juillet 2024 sur le site de l’ASN. L’ASN a rappelé que ces situations de ré‑irradiations soulèvent des enjeux forts, notamment lorsque les zones à traiter sont identiques ou voisines. En effet, si chaque traitement fait l’objet d’une planification veillant à préserver les tissus sains voisins de la tumeur, dits « à risque », en limitant autant qu’il est possible leur irradiation, le cumul de plusieurs traitements d’une même zone peut conduire à une irradiation significative de ces organes à risque. Ainsi, la prescription et la planification d’un traitement par radiothérapie doivent tenir compte des éventuels traitements antérieurs et de l’effet cumulatif des irradiations afin de ne pas dépasser, pour les organes à risque, des doses cumulées trop importantes. L’ASN a appelé l’attention des professionnels et de l’ensemble des centres de radiothérapie sur cette problématique croissante et sur la nécessité de mettre en place des barrières de sécurité et de les évaluer régulièrement. Ces enjeux particuliers ont conduit l’ASN à dresser en juin 2020 un retour d’expérience dans son bulletin sur « La sécurité du patient » consacré aux antécédents de radiothérapie. Ce bulletin souligne les enjeux cliniques importants liés à la prise en charge des patients qui bénéficient de plusieurs radiothérapies au cours de leur vie et dresse des pistes de progrès. Une inspection conduite par l’ASN le 23 août 2024, a permis de mieux appréhender le contexte de survenue de cet ESR, notamment à travers la consultation des éléments enregistrés dans le dossier médical du patient (compte-rendu de consultation de suivi, compte rendu de médecine nucléaire, date de validation, etc.) et de l’analyse conduite par la cellule qualité. Le plan d’action défini a été examiné et jugé globalement de nature à répondre aux défaillances constatées. Les inspecteurs constatent que la mise en œuvre d’un traitement par radiothérapie externe sans décision formelle en réunion de concertation pluridisciplinaire (obligatoire selon les dispositions de l’article R. 6123-91-1 du code de la santé publique) et l’absence de trace de consultation de suivi pendant les deux mois de traitement (obligatoire selon les dispositions de l’article. R. 6123-93 du code de la santé publique) représentent des non-conformités majeures dans l’organisation médicale du centre. Par ailleurs, la déclaration de l’événement le 20 juin 2024 alors que des comptesrendus médicaux de décembre 2023 évoquent des symptômes d’origine radique, est jugée trop tardive. Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2024 225 01 03 04 09 11 12 13 14 15 AN Les utilisations médicales des rayonnements ionisants 05 06 02 08 10 07

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