RAPPORT DE L’ASN 2024

2 Les activités nucléaires à finalité médicale 2.1 La radiothérapie externe La radiothérapie est, avec la chirurgie et la chimiothérapie, l’une des techniques majeures employées pour le traitement des tumeurs cancéreuses. La radiothérapie utilise les rayonnements ionisants pour la destruction des cellules malignes mais éga‑ lement non malignes, dysfonctionnelles, etc. On distingue la radiothérapie externe, où la source de rayonnements est exté‑ rieure au patient (accélérateur de parti‑ cules ou source radioactive scellées dans le cas du Gamma Knife®), de la curiethérapie, où une source radioactive scellée est positionnée au plus près de la lésion cancéreuse, soit par les cavités naturelles soit par des cathéters (voir point 2.2). Les séances d’irradiation sont toujours pré‑ cédées par l’élaboration du plan de traite‑ ment, qui a pour but de fixer les conditions permettant d’atteindre une dose élevée dans le volume cible tout en préservant les tissus sains environnants. Ce plan de traitement définit la dose à délivrer, le(s) volume(s) cible(s) à traiter, les organes à risque à protéger, la balistique des fais‑ ceaux d’irradiation et la répartition pré‑ visionnelle des doses (dosimétrie). Son élaboration nécessite une coopération étroite entre l’oncologue‑radiothérapeute, le physicien médical et, le cas échéant, les dosimétristes. Le principal enjeu de radioprotection est lié à la dose délivrée au patient ; l’évolution des techniques de traitement avec le développement de l’hypofractionnement (voir point 2.1.1), consistant à délivrer des doses plus importantes lors d’une même séance rend d’autant plus cruciale la maîtrise de la délivrance de cette dose. C’est pourquoi le contrôle de l’ASN porte, à la fois, sur la capacité des centres à maî‑ triser la délivrance de la dose au patient et à tirer les enseignements des dysfonc‑ tionnements observés ou susceptibles de se produire. La mise en œuvre du système de management de la qualité (SMQ) et de la sécurité des soins, la gestion des com‑ pétences, la maîtrise des équipements, la culture de déclaration et la capacité d’ana‑ lyse des événements indésirables dont les ESR sont ainsi au cœur des contrôles de l’ASN. Les changements techniques, orga‑ nisationnels et humains étant des situa‑ tions susceptibles de générer des risques, la conduite du changement fait également l’objet d’une attention particulière lors des inspections. 2.1.1 La présentation des techniques Plusieurs techniques de radiothérapie externe sont actuellement utilisées en France. La radiothérapie conformationnelle tridimensionnelle est considérée par la SFRO comme la technique de base dans son Guide de recommandations pour la pratique de la radiothérapie externe et de la curiethérapie (Recorad) actualisé en février 2022. Cette technique utilise des images tridimensionnelles des volumes cibles et des organes avoisinants, obtenues à l’aide d’un tomodensitomètre (scanner), parfois en association avec d’autres examens d’imagerie (tomographie par émission de positons – TEP, imagerie par résonance magnétique nucléaire – IRM, etc.). Depuis plusieurs années toutefois, la proportion de traitements réalisés avec cette technique diminue, au profit de la radiothérapie conformationnelle avec modulation d’in‑ tensité dite « RCMI » (Intensity‑modulated Radiotherapy – IMRT), qui a vu le jour en France au début des années 2000 et qui permet une meilleure adaptation à des volumes tumoraux complexes et une meil‑ leure protection des organes à risque voi‑ sins, grâce à la modulation d’intensité des faisceaux en cours d’irradiation. Dans le prolongement de la RCMI, l’arc‑ thérapie volumétrique avec modulation d’intensité (AVMI ou Volumetric Modulated Arc Therapy – VMAT) est désormais de plus en plus fréquemment mise en œuvre en France et est la technique de référence pour les cancers de la prostate et de la sphère ORL. Cette technique consiste à réaliser l’irradiation d’un volume cible par une variation continue de plusieurs para‑ mètres en cours de traitement : la forme et l’intensité des faisceaux, la position et la vitesse de rotation de l’accélérateur autour du volume cible et donc du patient. La radiothérapie hélicoïdale ou tomo‑ thérapie permet de réaliser des irradia‑ tions en combinant la rotation continue d’un accélérateur au déplacement longi‑ tudinal du patient en cours d’irradiation. La modulation possible de l’intensité du rayonnement permet de réaliser des irra‑ diations aussi bien de grands volumes de forme complexe que de lésions très loca‑ lisées, éventuellement dans des régions anatomiques indépendantes les unes des autres. Le système requiert l’acquisition d’images dans les conditions du traitement à chaque séance, à des fins de comparai‑ son avec les images scanographiques de référence pour repositionner le patient. La radiothérapie en conditions stéréo‑ taxiques est une méthode de traitement qui vise à irradier à forte dose des lésions (cancéreuses ou non) intra ou extracrâ‑ niennes, avec une précision submillimé‑ trique, par de multiples mini‑faisceaux convergeant au centre de la cible. La dose totale est délivrée lors d’une séance unique ou de façon hypofractionnée, selon la maladie à traiter. Cette technique exige une grande précision dans la définition du volume cible à irradier et fait notamment appel à des techniques de repérage spéci‑ fiques, afin de permettre une localisation millimétrique des lésions. L’augmentation des doses par séance implique générale‑ ment, pour les accélérateurs linéaires, l’utilisation de faisceaux non filtrés (Flattening‑Filter‑Free – FFF) permettant d’augmenter le débit de dose et ainsi la dose par séance. Cette technique thérapeutique utilise principalement trois types d’équipe‑ ments spécifiques, tels que : ∙le Gamma Knife® qui utilise plus de 190 sources de cobalt-60 soit autant de faisceaux non‑coplanaires centrés sur la tumeur. Le mouvement de la table sur laquelle le patient est positionné permet de délivrer la dose souhaitée à l’ensemble de la tumeur avec une grande précision ; ∙le CyberKnife®, constitué d’un accéléra‑ teur linéaire miniaturisé monté sur un bras robotisé, offrant près de 2 000 points d’en‑ trées non‑coplanaires du faisceau autour du patient. Cet appareil permet égale‑ ment un suivi de la position de la tumeur pendant l’irradiation (tracking) ; ∙des accélérateurs linéaires polyvalents équipés de moyens de collimation addi‑ tionnels (mini‑collimateurs, localisa- teurs permettant la réalisation de mini‑ faisceaux), dotés d’une précision méca‑ nique adaptée et d’une table avec 6 degrés de liberté (permettant notamment des trai‑ tements non‑coplanaires et un meilleur positionnement). Un nouvel accélérateur mono énergie de radiothérapie, plateforme gyroscopique autoblindée appelée « ZAP‑X® » (ZAP Surgical, 3 MV, mode FFF) a été autorisé en France en mars 2023 pour les traitements de radiothérapie et de radiochirurgie en conditions stéréotaxiques intracrâniennes (voir avis du Canpri aux points 1.2.2 et 1.3.2). Depuis 2018, l’association d’un accélé‑ rateur linéaire pour la radiothérapie couplé à une IRM se développe. La contacthérapie ou radiothérapie de contact est une technique de radio- thérapie externe. Les traitements sont déli‑ vrés par des appareils spécifiques mettant en jeu des faisceaux de photons de basse énergie dont la source de rayonnement est appliquée au contact de la lésion à irra‑ dier (superficielles tels que les cancers de la peau, endocavitaires tels que le cancer du rectum, parfois en contact du lit opé‑ ratoire après exérèse de tumeur tels que le cancer du pancréas, du foie, etc.). La radiothérapie peropératoire par électrons est fondée sur l’application d’un faisceau direct d’électrons (éner‑ gie jusqu’à 12 MeV) sur le champ opéra‑ toire au moyen d’accélérateurs mobiles d’électrons, disposant du marquage « CE », et munis d’un blindage incorporé 220 Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2024 Les utilisations médicales des rayonnements ionisants

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