Rapport de l'ASN 2021

Montrouge, le 1er mars 2022 En 2021, la sûreté des installations nucléaires ainsi que la radioprotection dans les secteurs médicaux, industriels et des transports de substances radioactives se sont maintenues à un niveau satisfaisant, en grande continuité par rapport au niveau constaté en 2020. Ce qui ressort plus particulièrement de l’année 2021, et notamment de sa seconde partie, ce sont les fragilités industrielles qui touchent l’ensemble des installations nucléaires et le débat qui s’est installé sur les choix de politique énergétique et la place du nucléaire dans ces choix. Sur ces sujets, l’ASN porte quatre messages clés : 1. Le système électrique français doit aujourd’hui faire face à une double fragilité inédite en matière de disponibilité qui touche tant les installations du «cycle du combustible» que le parc nucléaire des réacteurs. À cette fragilité s’est ajoutée la découverte inattendue d’un phénomène de corrosion sous contrainte sur plu‑ sieurs réacteurs d’EDF, qui constitue un événement sérieux du point de vue de la sûreté. Ces situations et fragilités, qui résultent pour l’essentiel de l’absence de marge et d’un déf icit d’anticipation, doivent servir de retour d’expérience pour l’ensemble de la filière nucléaire et les pouvoirs publics. 2. Les préoccupations de sûreté nucléaire doivent être placées au cœur des décisions de politique énergétique, au même niveau que les préoccupations de production d’électricité décarbonée à horizon 2050. Dans les 5 ans qui viennent, EDF devra questionner et justifier individuellement la capacité des réacteurs les plus anciens à poursuivre leur fonctionnement au‑delà de 50 ans, voire de 60 ans, de manière à permettre, dès que possible, d’en tirer les enseignements sur les capa‑ cités supplémentaires de production à prévoir. Parallèlement, compte tenu du développement pré‑ visible de l’électrification des usages, et au regard du besoin de maintenir des marges dans le système élec‑ trique, les pouvoirs publics devraient dûment peser, sauf impératif de sûreté, le choix affiché de l’arrêt défi‑ nitif programmé de 12 réacteurs supplémentaires d’ici 2035. Enf in, d’ici la f in de la décennie au plus tard, le Gouver‑ nement devrait se prononcer sur la poursuite ou non du retraitement des combustibles usés à l’horizon de 2040 pour en anticiper les conséquences, en matière soit de rénovation des installations actuelles, soit de solutions alternatives à prévoir pour la gestion des combustibles usés. 3. La perspective d’une politique énergétique comportant une composante nucléaire de long terme doit être accompagnée d’une politique exemplaire en matière de gestion des déchets et du nucléaire historique. Une telle politique suppose que des décisions soient prises, avant le terme du prochain Plan national de ges‑ tion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR), pour que tous les types de déchets disposent de filières de gestion opérationnelles dans les 15 à 20 ans à venir, et que les exploitants nucléaires se mobilisent davan‑ tage pour conduire, dans les délais prévus, les projets de reprise et de conditionnement sûr des déchets nucléaires historiques dont ils ont la responsabilité. 4. L’ASN réaffirme que les nouvelles perspectives de politique énergétique, quelles qu’elles soient, supposent un effort industriel considérable pour faire face aux enjeux industriels et de sûreté. Si le nucléaire fait partie des choix faits pour assu‑ rer un mix énergétique décarboné à horizon 2050, la f ilière nucléaire devra mettre en place un véritable «plan Marshall » pour rendre industriellement soute‑ nable cette perspective, et disposer des compétences lui permettant de faire face à l’ampleur des projets et à leur durée. La qualité et la rigueur de la conception, de la fabri‑ cation et du contrôle des installations nucléaires, qui n’ont pas été au niveau attendu dans les derniers grands projets nucléaires engagés en France, consti‑ tuent le premier niveau de défense en profondeur en matière de sûreté. Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2021 3 ÉDITORIAL DU COLLÈGE

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