Rapport de l'ASN 2017

49 Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2017 Chapitre 01  - Les activités nucléaires : rayonnements ionisants et risques pour la santé et l’environnement La dose, le débit de dose et la durée de l’exposition. Les études épidémiologiques réalisées sur les personnes exposées aux bombardements de Hiroshima et de Nagasaki ont permis de mieux connaître les effets des rayonnements sur la santé, pour des expositions dues à une irradiation externe (exposi- tion externe) en quelques fractions de seconde, à forte dose et fort débit de dose de rayonnements ionisants. Les études menées dans les pays les plus touchés par l’accident de Tcher- nobyl (la Biélorussie, l’Ukraine et la Russie) ont aussi fait avan- cer les connaissances sur l’effet des rayonnements sur la santé pour des expositions dues à la contamination interne (exposi- tion interne) notamment à l’iode radioactif. Les études sur les travailleurs du nucléaire ont permis de mieux préciser le risque pour des expositions chroniques à faibles doses établies sur de nombreuses années, que ce soit le résultat d’expositions externes ou de contaminations internes. Les effets héréditaires. La survenue d’éventuels effets hérédi- taires des rayonnements ionisants chez l’homme reste incertaine. De tels effets n’ont pas été observés chez les survivants des bom- bardements de Hiroshima et de Nagasaki. Cependant, les effets héréditaires ont été bien documentés dans des travaux expéri- mentaux chez l’animal: les mutations induites par les rayonne- ments ionisants dans les cellules germinales sont transmissibles à la descendance. La mutation récessive d’un gène sur un chro- mosome ne donnera aucun signe clinique ou biologique tant que le même gène porté par l’autre chromosome homologue ne sera pas atteint; si elle n’est pas nulle, la probabilité de ce type d’événement reste cependant faible. La protection de l’environnement. La radioprotection a pour but d’empêcher ou de réduire les effets nocifs des rayonne- ments ionisants sur les personnes, directement ou indirectement, y compris par l’effet des atteintes portées à l’environnement. Au-delà de la protection de l’environnement orientée vers la protection de l’homme et des générations présentes ou futures, la protection des espèces non humaines fait partie en tant que telle de la protection de l’environnement prescrite en France par la charte constitutionnelle de l’environnement. Ce sujet est maintenant pris en compte par la CIPR depuis 2007 (CIPR 103), et la manière de traiter la protection de la nature au nom de l’intérêt propre des espèces animales et végétales a fait l’objet de plusieurs publications depuis 2008 (CIPR 108, 114 et 124). 1.3.3 La signature moléculaire dans les cancers radio-induits Il n’est actuellement pas possible de faire la différence entre un cancer radio-induit et un cancer qui ne le serait pas. En effet, les lésions provoquées par les rayonnements ionisants au niveau moléculaire ne semblent pas différentes de celles qui résultent du métabolisme cellulaire normal, avec l’implication dans les deux cas de radicaux libres, en particulier oxygénés. De plus, ni l’examen anatomopathologique ni la recherche de mutations spécifiques n’ont permis de différencier jusqu’à présent une tumeur radio-induite d’une tumeur sporadique. Toutefois, un travail récent (Behjati et al. 2016) semble indiquer que deux types de mutations seraient plus fréquents; néanmoins, la faible taille de l’échantillon demande que ces données soient validées par des travaux plus importants. On sait qu’aux premières étapes de la carcinogenèse, une cellule apparaît présentant une combinaison particulière de lésions de l’ADN lui permettant d’échapper au contrôle habituel de la divi- sion cellulaire et qu’il faut une dizaine à une centaine de lésions de l’ADN (mutations, cassures…) en des points névralgiques pour franchir ces étapes. Tous les agents capables de léser l’ADN cel- lulaire (tabac, alcool, produits chimiques variés, rayonnements ionisants, température élevée, autres facteurs d’environnement notamment nutritionnels, radicaux libres du métabolisme cellu- laire normal…) contribuent au vieillissement cellulaire et in fine à la carcinogenèse. Dans une approche multirisque de la carcinogenèse, peut-on alors continuer à parler de cancers radio-induits ? Oui, compte tenu des nombreuses données épidémiologiques qui indiquent que la fréquence des cancers augmente lorsque la dose aug- mente, mais l’approche est certainement plus complexe, un can- cer résultant, dans certains cas, d’une accumulation de lésions provenant de facteurs de risques différents. Cependant, l’événe- ment radio-induit peut aussi être le seul en cause dans certains cas (cancers radio-induits chez les enfants). La mise en évidence d’une signature radiologique des cancers, c’est-à-dire la découverte de marqueurs permettant de signer l’éventuelle composante radio-induite d’une tumeur, serait d’un apport considérable dans l’évaluation des risques liés aux expo- sitions aux rayonnements ionisants. Le caractère multifactoriel de la carcinogenèse plaide pour une approche de précaution vis-à-vis de tous les facteurs de risques, puisque chacun d’eux est susceptible de contribuer à une alté- ration de l’ADN. C’est particulièrement important chez les per- sonnes présentant une radiosensibilité individuelle élevée et pour les organes les plus sensibles comme le sein et la moelle osseuse, et ce d’autant plus que les personnes sont jeunes. Les principes de justification et d’optimisation trouvent là toute leur place (voir chapitre 2). Les chromosomes, par paire, possèdent des bandes de coloration caractéristiques (Inserm).

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